vendredi, novembre 15

Il y a des morts qui importent moins que d’autres. Le plus souvent, les homicides (meurtre, assassinat) donnent lieu à des dramatisations médiatiques importantes.

A l’inverse, pendant longtemps, la mortalité routière et la violence intrafamiliale étaient des impensés de la vie sociale. Elles avaient une très faible visibilité et n’étaient pas traitées comme des problèmes méritant une attention particulière. La situation a changé depuis une quinzaine d’années, même si leur banalisation n’a pas été éliminée.

Triste bilan

La violence subie au travail va-t-elle connaître le même sort et être reconnue comme une situation chronique, socialement dommageable, pénalement sanctionnable et méritant une mobilisation particulière ? C’est ce que semble amorcer la campagne lancée par la nouvelle ministre du travail [Astrid Panosyan-Bouvet] il y a quelques jours.

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Les chiffres sont affligeants. Il y a en France 100 accidents graves par jour et deux décès quotidiens, soit de l’ordre de 750 annuels. Ce triste bilan est à peu près au même niveau que l’ensemble des homicides commis. On ne peut plus se contenter de dire qu’il y a fatalité d’un côté et insécurité de l’autre. C’est à tort que certains opposent l’erreur technique à la faute intentionnelle. C’est l’indifférence que ces situations ont suscitée jusqu’à aujourd’hui qui doit inquiéter et interpeller.

Il a fallu attendre novembre 2022 pour que le Collectif des familles : stop à la mort au travail se constitue et entame des actions pour faire reconnaître l’ampleur du problème et de son déni social.

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Il n’est cependant pas possible de soutenir que l’on a alors découvert l’ampleur de l’enjeu. La Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) publie annuellement des données sur ce sujet. Une enquête de la Cour des comptes de 2018 dresse le bilan de la réforme de l’administration du travail de 2015 et attire l’attention sur l’enjeu de la sécurité.

Un nombre sous-estimé

Un second rapport de 2024 analyse les ressources humaines de ce ministère et leurs conséquences, entre autres sur la sécurité au travail. Un ouvrage de Matthieu Lépine est explicitement intitulé L’Hécatombe invisible. Enquête sur les morts au travail (Seuil, 2023). Mais il n’a absolument pas eu le même écho que celui sur les pratiques des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ni dans la presse, ni chez les pouvoirs publics. Nul ne peut pourtant plaider l’ignorance.

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