jeudi, novembre 14

« Compressés par l’émotion », 40 skippers de la dixième édition du Vendée Globe s’élancent dimanche pour un nouveau périple en solitaire autour du monde, acclamés par des centaines de milliers de personnes réunies aux Sables-d’Olonne pour leur dire au revoir.

Les dernières heures passées à terre de ces héros de la mer ont, à chaque édition depuis 1989, attiré un public bien plus large que les simples passionnés de voile, permettant à l’événement d’acquérir une aura quasi-mystique.

Comme tous les jours de départ de l' »Everest des Mers », les aspirants tourdumondistes ont descendu un à un le ponton d’honneur au petit matin, rejoignant à leur bateau quelques techniciens triés sur le volet occupés aux derniers préparatifs.

Le navigateur Charlie Dalin (Macif) a été le premier à se prêter à cette émouvante tradition à partir de 7h22. Sollicité par de nombreux médias et officiels, il a réservé ses dernières minutes à terre à longues embrassades avec son fils et sa femme.

« Très content, super heureux de prendre le départ de ce deuxième Vendée pour moi. On a travaillé dur pour être prêt, c’est vraiment un jour de fête », a dit souriant Dalin, qui porte comme en 2020 le costume de favori avec Thomas Ruyant (Vulnérable), Yoann Richomme (Paprec Arkea) et Jérémie Beyou (Charal).

Pendant plus de deux heures, les au revoir se sont enchaînés entre les skippers et leurs proches, sous les yeux bienveillants d’anciens vainqueurs de l’événement.

– « Tout le monde pleure » –

« Il y a un tout petit peu moins de papillon dans le ventre à rester à quai, mais c’est toujours la même dinguerie de voir ces émotions », a apprécié Vincent Riou, victorieux en 2005.

« Cela va le faire, c’est une régate comme une autre, c’est juste une petite course », tentait de dire Yoann Richomme à sa mère en pleurs.

A 23 ans, la benjamine des partants Violette Dorange (Devenir) a été la dernière à quitter la terre à 9h37, encouragée par Catherine Chabaud, première femme à terminer le Vendée Globe en 1997.

« Je lui ai répété ce que ma mère m’avait dit avant mon départ : +pars libre et légère, ne te charge pas de tes émotions+ », a expliqué la navigatrice.

En rejoignant le large, où le départ sera donné à 13h02, les concurrents ont tous descendus le légendaire chenal des Sables-d’Olonne, dont les quais étaient entièrement bondés dès le lever du soleil.

Depuis le pont de leurs monocoques de 18 mètres, le Japonais Kojiro Shiraishi (DMG Mori) et le Chinois Jingkun Xu (Singchain team Haikou) ont découvert cornes de brume et banderoles de soutien à perte de vue.

Les balcons des immeubles qui bordent le chenal étaient plein à craquer, leurs occupants scandant le nom de chaque marin passant devant eux.

« On se retrouve tous très petits au milieu de la foule. Tout le monde à bord du bateau pleure, les gens sur les quais pleurent, tu ne peux pas te retenir, tu es compressé de partout par l’émotion », racontait quelques jours avant le départ le Suisse Alan Roura (Hublot), qui s’élance pour la troisième fois.

– Vers un record ? –

À quatre minutes du coup de canon, le dernier équipier présent sur les voiliers sautera en mer pour laisser seul son skipper se rendre sur la ligne. « Cela peut être un moment assez brutal de passer de cette émotion au grand vide », a dit la Britannique Samantha Davies (Initiatives Coeur), à la veille de sa 4e participation.

« Tu te dis que tu as trois mois devant toi, seule, et en même temps il faut très vite se reconcentrer sur la course », ajoute la navigatrice de 50 ans. Devant les étraves, 24.300 milles théoriques, soit 45.000 km, à parcourir sans aide extérieure.

Le plus rapide à avoir jamais bouclé l’exercice est Armel Le Cléac’h en 2016/2017 (74 jours et 3 heures). La rapidité et la fiabilité des bateaux de cette 10e édition laissent à penser que le record pourrait tomber cette année.

La météo annoncée dans les premiers jours de course ne va toutefois pas jouer en leur faveur. Le petit temps – 3 à 10 noeuds dans l’après-midi – devrait limiter les risques de casse, mais aussi ralentir la flotte de manière conséquente jusqu’au Cap Finisterre.

Les premiers marins sont attendus de retour en Vendée à la mi-janvier.

fd-ld/smr

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