vendredi, juillet 5

Dans moins d’une semaine, mardi 9 juillet, la première Ariane-6 décollera de Guyane. Il sera alors 15 heures à Kourou et 20 heures à Paris. Ce moment est attendu depuis dix ans, depuis que les Européens, en 2014, se sont rendu compte que SpaceX, la société d’Elon Musk, avec sa fusée Falcon-9, bouleversait les règles du secteur en cassant les prix des lancements. Il leur fallait réagir face à ce perturbateur pour ne pas être laminé.

Mais la réponse n’a pas été aussi rapide qu’espéré. En cause, des lourdeurs d’organisation et des hésitations sur les choix technologiques, sur fond de tension entre Français et Allemands. « Ne nous le cachons pas, l’industrie spatiale européenne est aujourd’hui en risque, alertait Philippe Baptiste, le président du Centre national d’études spatiales (CNES), le 13 juin, lors du Paris Air Forum. Nous devons avoir des réponses et des remises en question fortes. Cela concerne tant les agences que les industriels, il faut être capable de travailler différemment, de faire émerger de nouveaux acteurs pour aller plus vite, car on a été parfois trop lents et nous avons raté des évolutions technologiques. »

La situation est d’autant plus critique que désormais toute la filière est ébranlée par l’onde de choc Elon Musk, des lanceurs aux opérateurs de satellites en passant par les constructeurs. « Quand SpaceX fragilisait Ariane, c’était la France qui semblait la plus touchée. Aujourd’hui, comme cela concerne toute la chaîne de valeur, c’est l’Europe entière qui est visée, estime Stéphane Israël, président exécutif d’Arianespace. Personne ne peut accepter cette surdomination, et je suis persuadé que les acteurs vont s’organiser pour trouver des alternatives. »

« Impressionnés et déprimés »

En attendant, Elon Musk ne manque pas une occasion d’afficher son hégémonie. Mi-mars, à la veille du Satellite 2024, qui réunit chaque année à Washington l’ensemble du monde spatial, le milliardaire conviait une vingtaine de ses clients sur son site texan de Boca Chica, où sont assemblées et lancées ses fusées géantes Starship. Ce jour-là, cinq d’entre elles étaient alignées dans le hall d’assemblage, leurs 120 mètres de haut renforçant l’impression de gigantisme. Dans le vol de retour vers la capitale américaine, il proposait à ses invités, la plupart étant des opérateurs de satellites, de tester la liaison Internet assurée grâce à sa constellation Starlink. « We are impressed and distressed », tel était le sentiment général à la sortie de l’avion. Impressionnés par la prouesse technique du futur lanceur, mais déprimés par l’avance prise dans les télécoms.

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