mardi, mai 21

Il existe un monde que bien peu connaissent, celui des personnes porteuses d’un handicap sévère, soit qu’elles soient nées ainsi, soit qu’un incident de la vie les ait rendues extrêmement vulnérables. Nous parlons ici de personnes avec un besoin d’aide quasi permanent dans tous les actes de la vie quotidienne. Ces actes qui semblent si simples aux valides. Pour elles, rester propre, manger, se déplacer, se faire comprendre, sont plus que des défis : tous ces actes relèvent de l’impossible sans aide, soit d’un « proche aidant » (souvent un parent), soit d’un professionnel.

Ces derniers relèvent des métiers dits « de l’autonomie ». Mais ce sont plutôt les métiers de l’extrême dépendance, même si une partie du travail consiste à imaginer comment les personnes peuvent participer, choisir et s’exprimer. Car souvent seule une connaissance intime des expressions infraverbales peut permettre de les décoder.

Ce monde extraordinaire demande aussi beaucoup d’engagement, et de moyens humains, en quantité comme en qualité : ces personnes sont handicapées 365 jours par an, 24 heures sur 24, avec les contraintes de travail qui vont avec.

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De plus, certains protocoles éducatifs ou médicaux doivent être réalisés avec rigueur, et de la même manière, en famille et en institution. La qualité de l’accompagnement, la limitation des troubles du comportement en dépendent. Or, depuis plusieurs années, les personnes lourdement handicapées sont oubliées des politiques publiques.

Critiques européennes et de l’ONU

Il existe certes une politique du handicap, « inclusive », qui a pris une accélération très forte au cours du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Il s’agissait de répondre aux critiques européennes et de l’ONU, en partie fondées, sur notre système considéré comme trop « institutionnel », voire « carcéral ».

Mais d’une politique inclusive qui aurait pu, dû, être différenciée, nuancée selon le degré de dépendance des personnes, nous avons basculé dans une idéologie « inclusiste », qui n’envisage plus, et même refuse, des réponses institutionnelles. Derrière cet « inclusisme », il y a un déni de la grande vulnérabilité : il n’y aurait pas de handicap, mais des particularités, des spécificités, auxquelles l’acceptation des différences et l’ouverture de chacun seraient les réponses évidentes et suffisantes.

Or, pour les personnes dont nous parlons ici, dépendantes pour tous les actes de la vie quotidienne, cette idéologie ne fonctionne pas : les proches aidants ont aussi le droit d’avoir une vie, et sont amenés un jour à disparaître.

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