vendredi, mai 17

Pendant la crise de la zone euro, ils avaient été affublés d’un acronyme particulièrement insultant : les « PIGS » (« cochons » en anglais), pour Portugal, Italie, Grèce et Espagne (« Spain » en anglais). Ils étaient les mauvais élèves économiques, regardés de haut par les tenants de l’orthodoxie, Allemagne en tête. Lors des négociations tendues des différents plans de secours, une couche d’idées préconçues et de clichés n’avait pas aidé : ces pays, c’est bien connu, étaient remplis de travailleurs paresseux, de corruption et de bureaucratie inefficace.

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Une décennie plus tard, l’homme malade de l’Europe est l’Allemagne, actuellement en récession. Les pays du Sud, qui affichent une croissance étonnamment robuste, prennent leur revanche. « Les cochons ont des ailes », écrivait, dès novembre 2023, BCA Research, un cabinet de conseil en investissement. Entre 2019 et 2023, période de pandémie de Covid-19 comprise, la Grèce et le Portugal ont enregistré une croissance cumulée de presque 6 %, l’Italie de 3,5 %, l’Espagne de 2,5 %, la France de 1,5 % et l’Allemagne de… 0,7 %.

A y regarder de plus près, le rattrapage a même débuté dès 2017. D’après les calculs de Capital Economics, un cabinet d’études économiques, ces quatre pays périphériques ont connu une croissance supérieure à l’Allemagne de 5 points depuis cette date.

Réduction drastique du chômage

Bien sûr, cette divergence reflète avant tout un soudain changement de circonstances qu’il aurait été bien difficile à prévoir. Le modèle allemand était fondé sur deux piliers : l’industrie, dépendant du gaz russe à bon marché, et les exportations. La guerre en Ukraine a détruit le premier. La nouvelle guerre froide entre les Etats-Unis et la Chine a effrité le second. Quant à la transition vers les véhicules électriques, elle fait vaciller un des secteurs les plus importants du pays.

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De l’autre côté, les pays du Sud ont surfé sur la forte poussée du tourisme, l’une de leurs principales forces, après la réouverture postpandémie des économies. L’Union européenne a aussi joué un rôle capital avec le plan NextGenerationEU, en 2021, un emprunt en commun de quelque 800 milliards d’euros. Si les versements sont d’une lenteur tout européenne, et doivent s’étirer jusqu’en 2026, ils profitent avant tout aux pays périphériques, l’Italie et l’Espagne étant les deux premiers bénéficiaires.

L’amélioration est cependant plus profonde que cela. Les (violentes et difficiles) réformes du marché du travail ont permis une réduction drastique du chômage. En Espagne, celui-ci est passé de 25 % en 2014 à 11,5 % aujourd’hui ; en Italie, de 13 % à 7,5 % ; en Grèce de 26,5 % à 10 %. Les banques ont aussi été assainies, même en Italie, où l’inquiétude a longtemps été récurrente dans ce domaine.

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