Que se passe-t-il à Bercy pour que les ministres de l’économie et de l’industrie successifs et leur administration ne sourcillent pas quand un « serial repreneur » enchaîne les rachats d’entreprises sans avoir les moyens humains et financiers de les redresser ?
C’est la question que pose l’affaire ACI. Le groupe dirigé par Philippe Rivière et Patrice Rives, « engagé pour la souveraineté industrielle », selon son site Internet, a repris 36 PME en six ans et demi, sous le regard bienveillant des pouvoirs publics. Il est aujourd’hui en redressement judiciaire.
« Il faut que cela serve de leçon », insiste Ludwig Béraud, secrétaire de la CGT-Métallurgie de la Loire. « Est-ce que Bercy est prêt à faire que ça ne se reproduise plus ? »
En tout cas, le ton semble avoir changé. En octobre, le directeur général de la Fonderie de Bretagne, rachetée par un autre habitué des reprises d’entreprises en difficulté, Europlasma, est brutalement écarté parce qu’il s’inquiétait de ne voir arriver ni les fonds ni les commandes. Le comité social et économique de l’entreprise a alors déclenché son droit d’alerte et le ministre de l’industrie, Sébastien Martin, a aussitôt réagi par la réunion d’un « comité de suivi ».
Le 17 novembre, le même ministre a déclaré qu’il allait « saisir les tribunaux » contre Greybull, le fonds qui avait repris le sidérurgiste Novasco en 2024 et n’avait injecté que 1,5 des 90 millions promis quand l’Etat avait, lui, versé sa part – 85 millions d’euros. Le récent rapport sénatorial sur les aides publiques aux entreprises, publié le 8 juillet, a aussi appelé à la vigilance sur l’usage des fonds publics.
Une entreprise qui va mal ne coûte pas cher
Même les financiers sortent du bois. Sur le réseau social LinkedIn, le 22 octobre, Nicolas de Germay, président de l’Association des investisseurs en retournement (AIR), prévient : « Le serial repreneur est une illusion. » ACI « ne sera pas le premier à profiter de la naïveté des politiques à qui ils retirent une épine du pied avant de s’effondrer, entraînant avec eux les salariés désabusés ». Il est assez facile de racheter une entreprise qui va mal avance-t-il, elle ne coûte pas cher, parfois même le vendeur ou l’Etat aide financièrement. Mais ensuite, tout se complique. Les besoins en capital (trésorerie et fonds propres) sont très importants or, dans ce type de dossier, les banques ne suivent pas.
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