lundi, octobre 14

Six romans, deux livres d’histoire, deux recueils de poésie, une biographie, un récit, une BD, un beau livre, un livre jeunesse… Voici les brèves critiques de quinze ouvrages notables en cette quarante-et-unième semaine de l’année.

Roman. « Quelques instants pour l’éternité », de Kjersti Anfinnsen

Aux yeux de la Norvégienne Kjersti Anfinnsen (née en 1975), l’existence des retraités constitue une matière littéraire captivante, trop peu exploitée. En témoignent les deux courts romans qu’elle a réunis dans le présent volume. Une prose minimaliste, des chapitres faits quelquefois d’un unique paragraphe égrainent l’existence de son héroïne. Pour sa propre retraite, cette dernière a choisi de vivre à Paris, de sorte que le texte est un double adieu, au pays natal et à la vie d’antan. Le récit fait penser au journal de bord d’une vie nouvelle tissée de souvenirs, des menus soucis du quotidien, mais aussi de passions et de dilemmes. Pas de grandes orgues, plutôt de la musique de chambre. Avec pour résultat une gracieuse méditation sur les choses qui périssent et celles qui demeurent. E. Ba.

« Quelques instants pour l’éternité » (De siste kjærtegn. Oyeblikk for evigheten), de Kjersti Anfinnsen, traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud, Mercure de France, 140 p., 23 €, numérique 17 €.

Roman. « Limberlost », de Robbie Arnott

Quand Limberlost est paru dans sa langue originale, en 2022, Robbie Arnott, considéré comme un jeune prodige des lettres australiennes (il est né en Tasmanie en 1989), a écrit sur son discret fil Instagram : « De loin ce que j’ai écrit de plus personnel (…). J’espère que cela vous plaira. » Plaire est très en deçà de la réalité tant ce roman (remarquablement traduit par Laure Manceau, qui a également signé la traduction de ses deux précédents, Flammes et L’Oiseau de pluie, Actes Sud, 2019, et Gaïa, 2022) ­bouleverse.

Tout commence à l’embouchure d’un fleuve : une ­baleine enragée serait responsable de nombreux naufrages. Ned, qui a alors 5 ans, se souvient de cette nuit glacée passée sur l’eau à l’attendre. Dix ans plus tard, il traque des lapins (un nuisible en Australie) pour s’acheter un bateau et revenir sur les lieux de cette scène primitive. Pour revenir aussi au temps où ses frères n’étaient pas encore partis à la guerre – nous sommes en 1940 –, où sa sœur semblait moins triste et où son père, accablé par la mort de sa femme, n’errait pas, le regard ­absent, dans son verger sans pommes.

Dès lors, on suit les cadeaux et les accrocs que la vie a choisi d’offrir à Ned. Il est question de rêves et de sacrifices, de conversations taiseuses et d’amour tendre. Avec une lucidité déconcertante, Robbie Arnott écrit la vie comme elle va et s’en va, souvent sur la pointe des pieds. Et s’il dit la finitude, il suggère aussi, et avec quelles justesse et précision, les beautés époustouflantes de la nature et les ­voluptés qu’elle ­procure. E. G.

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