lundi, octobre 28

Romans, poésie, essai, récit, bande dessinée, science-fiction, histoire de l’art, philosophie, jeunesse… Voici les brèves critiques de seize ouvrages notables en cette quarante-troisième semaine de l’année.

Roman. « Les Présences imparfaites », de Youness Bousenna

Une grosse génération sépare Marc Pépin, le narrateur des Présences imparfaites né en 1961, de Youness Bousenna, l’auteur de ce premier roman, âgé de 34 ans (et collaborateur du Monde). Cela n’empêche pas le second de donner à la confession du premier le grain de l’authenticité, le sentiment d’une résolue justesse, tout au long de ce texte où le personnage, à l’orée de la soixantaine, fait retour sur une existence passée à fuir l’ennui, sentiment prégnant de son adolescence dans une famille de la classe moyenne habitant la banlieue parisienne. Cette soif d’ailleurs l’a amené à devenir journaliste, reporter pour le service international du Figaro, habitué des zones de guerres et autres terrains dangereux. Mais peut-on échapper à soi ?

Youness Bousenna prête à Marc Pépin, qu’il dote aussi d’une carrière d’écrivain, une plume d’élégant moraliste, au classicisme légèrement guindé, pour dresser ce bilan existentiel. Avec une lucidité sans fard, il revient sur une vie que la colère aura fait passer à côté de l’essentiel et sur certains grands mouvements collectifs, historiques, des cinquante dernières années. R. L.

« Les Présences imparfaites », de Youness Bousenna, Rivages, 210 p., 19,50 €, numérique 15 €.

BD. « La Chiâle », de Claire Braud

Comment, à partir d’un sujet aussi peu affriolant sur le papier que l’exploration d’une dépression, faire un ouvrage d’une sincérité poignante ? La prouesse de Claire Braud tient à la distance pleine d’ironie avec laquelle elle s’emploie à trouver l’origine des torrents de larmes qui inondent régulièrement ses joues. Cachée derrière un avatar burlesque prénommé Carilé, l’autrice dissèque sans pincettes ses vulnérabilités, martyrisée par deux événements aux airs de trauma : les attentats de novembre 2015, qu’elle « vécut » cachée dans le sous-sol d’un magasin parisien en priant pour que son statut de provinciale la soustraie aux balles ; un massacre d’Etat dans un pays asiatique, dont elle relata l’horreur en tant qu’assistante pour un film documentaire.

Ne refusant aucune audace narrative, comme l’usage de l’anthropomorphisme pour évoquer des rancœurs familiales au sein d’un milieu agricole en pleine mutation, le trait moins désinvolte qu’il n’y paraît de la dessinatrice examine au passage certains maux de l’époque, du patriarcat récalcitrant à la destruction de la nature, qu’aucun épanchement lacrymal ne saurait contrebalancer. F. P.

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