samedi, juin 29

« Aidons-nous mutuellement, la charge des malheurs en sera plus légère… » La célèbre fable de Jean-Pierre Claris de Florian sur l’aveugle et le paralytique est un message d’humanité pour tous les éclopés du monde. Dans le domaine de la voiture électrique, on ne manque pas d’individus mal-en-point en ce moment. Dernier en date, Rivian, la start-up américaine qui produit des SUV et pick-up électriques.

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Créée en 2009, épaulée dix ans plus tard par Ford et Amazon, devenus actionnaires, la société a fait une entrée fracassante en Bourse en 2021. Elle est maintenant au bord du dépôt de bilan, paralysée par des dépenses qui explosent face à des ventes qui flanchent. Au premier trimestre 2024, elle a perdu 1,4 milliard de dollars (1,31 milliard d’euros), soit plus que son chiffre d’affaires sur la même période.

Elle vient de croiser sur sa route un géant à la force colossale mais qui ne sait plus où aller, comme aveugle au changement du monde. Le virage de Volkswagen vers l’automobile électrique est un désastre en dépit des milliards engagés. Sa filiale Cariad, fondée en 2020 et forte de cinq mille ingénieurs dans le logiciel, accumule les bugs et les retards sur la définition de sa plate-forme logicielle. Les patrons se succèdent et finalement près de deux mille emplois devraient être supprimés.

Une société commune 50-50

Alors l’aveugle charge sur son dos le paralytique. L’allemand va investir cette année 1 milliard de dollars dans le capital de Rivian, créer une société commune 50-50 à laquelle elle achètera pour 2 milliards de dollars de prestations et promet d’ici à deux ans d’engager encore deux autres milliards dans la société mère. Au total ce sont donc 5 milliards de dollars qu’engage l’entreprise allemande dans la start-up américaine. Une part non négligeable de son plan d’investissement de plus de 100 milliards de dollars dans l’électrique d’ici à 2027.

La manne est inespérée pour Rivian qui se voyait suivre le chemin de son concurrent Fisker, qui a fait faillite le mardi 18 juin, sur un marché américain qui se convertit plus lentement que prévu à la voiture électrique. La firme pourra relancer son projet d’usine en Géorgie et tenter de rentabiliser sa production alors qu’elle perd encore 38 000 dollars par voiture, vendue pourtant plus de 70 000 dollars pièce.

Volkswagen de son côté va pouvoir utiliser tout de suite l’architecture logicielle de Rivian dans ses véhicules. Elle s’ouvre aussi un marché haut de gamme aux Etats-Unis. Mais cela ne résout qu’une partie des problèmes du constructeur allemand. Pour résister à l’offensive chinoise en Europe, il doit aussi trouver le moyen de produire des voitures moins chères. Le chemin sera long avant qu’il ne recouvre la vue.

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