dimanche, juin 30

Le Rassemblement national (RN) n’est jamais aussi habile que lorsqu’il joue sur les peurs des Français : celles de l’étranger, du délinquant, du déclassement… Paradoxalement, le sujet du changement climatique ne fait pas partie de ses angoisses. Face à ce défi majeur, qui préoccupe l’humanité tout entière, le parti d’extrême droite se veut rassurant.

Alors que l’accélération des dégradations liées aux phénomènes climatiques devient de plus en plus évidente, Marine Le Pen trouve que les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sont « alarmistes ». Largement en tête dans les enquêtes d’opinion à la veille du premier tour des élections législatives, le RN se distingue par la dénonciation d’une écologie prétendument punitive, avec pour seul projet de détricoter les quelques progrès accomplis ces dernières années.

La contestation de la lutte contre le changement climatique est un thème porteur pour les partis cherchant à surfer sur les mécontentements. Le dernier scrutin européen a montré que l’instrumentalisation des enjeux écologiques pouvait être payante électoralement. L’adaptation au changement climatique, la difficulté de la financer, le bouleversement des modes de vie : tout concourt à faire de la protection de l’environnement un bouc émissaire bien commode. Mais ignorer un problème n’a jamais permis de le résoudre.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Le RN est-il climatosceptique ?

L’écologie du « bon sens » prônée par le RN est celle de la facilité et de la démagogie à l’état pur. La protection du pouvoir d’achat conduit à faire la promotion des énergies fossiles en baissant la TVA, ce qui conduira à importer davantage de gaz et de pétrole, à rebours de la souveraineté énergétique revendiquée. Porter un coup d’arrêt à l’éolien, comme Jordan Bardella le préconise, va aboutir à faire grimper les factures d’électricité. Quant au nucléaire, avec le RN, il devient une solution magique à la décarbonation sans se préoccuper des délais nécessaires à la reconstitution de la filière. Là où il faut accélérer, innover, financer, l’extrême droite ne parle que de renoncements et de moratoires.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Législatives 2024 : le programme du RN maintient les filières de l’éolien et du solaire dans l’inquiétude

Le RN promet aux Français une écologie sans contraintes, en renonçant à lutter contre les passoires thermiques, en les laissant continuer à rouler au diesel, tout en fustigeant les principes d’une agriculture responsable. Le pays se retrouverait encapsulé dans un passé magnifié, dans lequel il serait possible de garder nos habitudes de vie, nos paysages, nos modes de production et de déplacement. Ce schéma s’apparente à un refus d’obstacle.

Aux antipodes de la culture de ce parti

Les propositions du RN ne sont qu’un anti-programme écologique, qui conduirait à un recul dramatique dans ce domaine et qui écarterait irrémédiablement la France de la trajectoire de l’accord de Paris sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés « Le RN assume de poursuivre et de renforcer tout ce qui a contribué à inonder les maisons de Blendecques »

C’est sans doute sur ce point qu’on touche à l’essence même de l’idéologie d’extrême droite. Le repli sur soi, la priorisation de l’intérêt national sur le reste de l’humanité, le cantonnement des problématiques aux frontières des pays sont incompatibles avec la logique de la lutte contre le réchauffement climatique, qui réclame coopération, universalisme, solidarité, autant de valeurs aux antipodes de la culture de ce parti.

Avec pour unique stratégie la préférence nationale et les relocalisations, la France s’isolerait sur le plan diplomatique et prendrait un retard considérable dans la course au verdissement de l’économie. Le « rassurisme » du RN en matière d’écologie a tout pour inquiéter.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Législatives 2024 : en matière climatique, des programmes aux antipodes

Le Monde

Réutiliser ce contenu
Partager
Exit mobile version