
La production de moules en Méditerranée va être mise en péril par le réchauffement climatique dès 2050, selon une étude scientifique, qui a constaté un « effondrement total » des élevages dans les conditions climatiques prévues à cette date. « Ce papier est un appel à l’adaptation au réchauffement climatique », a déclaré à l’Agence France-Presse Fabrice Pernet, chercheur à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), et auteur principal de cette étude parue en décembre dans la revue Earth’s Future.
Durant quatorze mois, en 2022 et 2023, les chercheurs ont étudié la survie de moules et d’huîtres placées dans un container alimenté par de l’eau non filtrée issue de la lagune de Thau (Hérault), lieu d’une forte activité conchylicole.
« On est au plus près de la vérité du futur », a assuré M. Pernet, précisant que les mollusques avaient été baignés dans la salinité, l’oxygène, le phytoplancton et les virus et bactéries de la lagune. Pour reproduire les conditions attendues en 2050, 2075 et 2100, l’eau était seulement chauffée (de + 1° C à + 3° C) et enrichie en CO2 pour reproduire l’acidification de l’océan.
Stratégies d’adaptation
A la fin de l’expérimentation, la mortalité des moules était « presque totale dans toutes les conditions futures de température » et d’acidification, selon l’étude qui décrit des résultats « alarmants ». Une augmentation relativement modeste de la température prévue pour 2050 (+ 1° C) a entraîné la mortalité totale des moules pendant l’été. « C’est une expérimentation dont les résultats sont corroborés par les observations en Méditerranée orientale, où l’on assiste déjà à des épisodes de mortalité massive dans des élevages de moules en Italie ou en Grèce », précise Fabrice Pernet.
En comparaison, les huîtres ont montré une meilleure résistance aux conditions climatiques présentes et futures. Même si leur mortalité est 1,5 fois plus élevée en 2100, ces bivalves affichent un taux de survie toujours confortable, avoisinant les 77 %. Leur croissance est cependant réduite de 40 % en 2100, comparée aux conditions actuelles, ce qui risque d’entraîner une augmentation des coûts d’exploitation et de leur temps d’exposition à des risques environnementaux (algues toxiques, polluants, pathogènes, etc.) pour atteindre une taille comparable.
Pour les chercheurs, il est d’ores et déjà urgent de travailler à des stratégies d’adaptation, comme la sélection de variétés plus résistantes, la coculture avec des algues, ou la relocalisation des activités conchylicoles en pleine mer, là où les températures et l’acidité de l’eau montent à des niveaux moins élevés. « On est très près du point de bascule », a averti Fabrice Pernet.




