La recherche d’une « souveraineté spirituelle » en temps de guerre conduit l’Ukraine à dissoudre un clergé orthodoxe sous emprise russe. Le Parlement ukrainien a approuvé, mardi 20 août, une loi interdisant les organisations religieuses liées à la Russie, ouvrant ainsi la voie à une interdiction complète des activités de l’église orthodoxe affiliée à Moscou sur son territoire. Quelque 265 législateurs de la Verkhovna Rada ont voté mardi matin en faveur de la loi en deuxième et dernière lecture, soit une nette majorité sur un total de 450 députés. Vingt-neuf législateurs ont voté contre la loi, le reste s’est soit abstenu soit était absent de l’hémicycle.
Pour être appliquée dans trente jours, la loi doit encore être promulguée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Ce qui ne fait guère de doute, car ce dernier a salué sur Telegram quelques heures après le vote « le travail de la Verkhovna Rada. La loi sur notre indépendance spirituelle a été adoptée. Nous en avions parlé avec les membres du Conseil des églises et des organisations religieuses. Je m’entretiendrai avec des représentants du patriarche œcuménique [de Constantinople] Bartholomée. Nous continuerons à renforcer l’Ukraine et notre société », a-t-il déclaré.
Les autorités ukrainiennes affichent une hostilité croissante depuis 2014 envers le clergé de l’Eglise orthodoxe ukrainienne du patriarcat de Moscou (connu sous l’acronyme ukrainien « UPC MP »), affirmant que cette dernière influence sa population dans les intérêts du Kremlin. Kiev lui préfère un autre clergé orthodoxe (connu sous l’acronyme ukrainien « PCU ») formé en 2018 et qui a obtenu l’année suivante – au grand dam de Moscou – le statut d’église autocéphale des mains du Patriarche de Constantinople.
Collaoration avec le FSB dénoncée
L’UPC MP est accusé par Kiev d’être un relais de l’Eglise orthodoxe russe, elle-même au service du Kremlin, ce qui s’observe à travers des prêches dissolvant l’identité ukrainienne dans l’identité russe et imposant un récit absolvant la Russie de sa responsabilité dans l’agression militaire subie par l’Ukraine depuis 2014.
Les autorités ukrainiennes accusent en outre l’UPC MP de travailler en étroite collaboration avec le FSB, le puissant service de sécurité russe. De nombreux membres du clergé de l’UPC font l’objet de poursuites judiciaires pour intelligence avec l’ennemi et certains ont déjà été échangés contre des prisonniers de guerre ukrainiens capturés par la Russie.
Le haut clergé de l’UPC MP affirme avoir clairement rompu ses liens avec l’Eglise orthodoxe russe (EOR) le 27 mai 2022 au cours d’un synode, durant lequel un changement de statut précise « l’autonomie et l’indépendance complète de l’UPC ». Sous la pression de l’opinion publique ukrainienne après trois mois de guerre, le clergé avait quelques jours plus tôt publié un communiqué offrant pour la première fois son soutien aux forces armées ukrainiennes, tout en condamnant l’invasion russe. La loi votée mardi accorde neuf mois aux paroisses affiliées à l’UPC MP pour « couper ses liens avec l’Eglise orthodoxe russe ».
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