lundi, octobre 14

« Je suis capitaliste. » C’est par cette profession de foi pour le moins inattendue que Kamala Harris s’est présentée devant les cercles économiques de Pittsburgh (Pennsylvanie), le 25 septembre, révélant dans le même souffle son projet pour le pays : une économie « d’opportunités », où chacun peut « entrer dans la compétition », et un capitalisme de la classe moyenne régulé juste ce qu’il faut.

Lors du débat face à son adversaire Donald Trump, Kamala Harris s’était prévalue de l’approbation de la banque Goldman Sachs, et elle a détaillé par la suite son approche « pragmatique » : des crédits d’impôt aux familles en guise de politique sociale, une augmentation modérée du taux d’imposition sur les entreprises, la poursuite de la fracturation hydraulique pour assurer le bas coût de l’énergie et un soutien fiscal aux jeunes entrepreneurs.

Bien sûr, la candidate démocrate entend contrer les caricatures de son adversaire, qui la dépeint en bolchevique, mais cette réaffirmation des vertus du capitalisme est aussi sa proposition essentielle. Alors que la vulnérabilité économique est la première préoccupation des électeurs qui, dans les campagnes et les villes, sur les campus comme dans les églises, expriment un profond sentiment d’aliénation, Kamala Harris propose de ressusciter le capitalisme libéral et mesuré qui aurait fait la gloire de la classe moyenne américaine dans l’histoire.

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Lieu commun du discours national, cette croyance en un capitalisme qui serait l’horizon indépassable des Etats-Unis puise aux sources de la pensée libérale : La Richesse des nations, ouvrage maître d’Adam Smith (1723-1790) publié l’année de l’indépendance des Etats-Unis (1776), est l’intertexte de cette vision messianique du capital qui rapproche hommes et nations, libère de la pénurie, assure la liberté des individus et prémunit même des injustices et de l’arbitraire.

Femme, noire et asiatique qui n’en dit mot, Kamala Harris propose ainsi un capitalisme postracial, sans lutte de classes, où la prospérité est partagée entre des citoyens équitablement équipés face aux « opportunités » du marché. Une même nostalgie pour un capitalisme « originel » et perdu rapproche ainsi étrangement les deux candidats.

Les fondamentalistes du marché

Le capitalisme libéral bienveillant, aveugle aux différences de Kamala Harris, s’oppose cependant en tout point à celui qui est incarné et défendu par Donald Trump. Promoteur immobilier et investisseur de la tech, le milliardaire d’extrême droite défend ardemment accumulation du capital et croissance économique éperdue. Hétérodoxe peut-être, son protectionnisme industriel n’est en réalité qu’un outil au service du productivisme et ne s’accompagne en aucun cas d’une remise en cause de la globalisation financière, infiniment plus importante pour l’économie américaine et mondiale.

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