Norvège, 1891. Les 1 250 miles nautiques qui séparent Bergen (deuxième ville du pays après Oslo, plein sud) de Kirkenes (69 degrés nord, mer de Barents) regorgent de harengs, de flétans et de morues, mais aussi de récifs, d’étroits bras de mer hérissés d’à-pics et d’îles aussi merveilleuses aux oiseaux que fatales aux hommes. Il n’existe alors que 28 phares et deux cartes nautiques : les communications sont lentes et dangereuses – redoutables même, surtout la nuit.
Mais pour le gouvernement norvégien, cette liaison est cruciale, pour les hommes comme pour l’économie, il faut trouver un moyen de l’assurer. Les appels d’offres se multiplient : silence radio des compagnies maritimes, mais pas de Richard With, « capitaine courageux » kiplingien, expérimenté et têtu, convaincu que le pari est réalisable.
« Hurtig gruten »
Le 2 juillet 1893, son bateau à vapeur DS Vesteralen appareille du port de Trondheim (au nord de Bergen). Tout le monde le croit fou. « Il ne savait pas que c’était impossible, alors il l’a fait », aurait dit Twain. Trois jours, deux nuits de navigation et neuf escales plus tard, il atteint Hammerfest, à quelques milles du cap Nord. C’est une révolution, une nouvelle ligne de vie pour les Norvégiens, les échanges et l’industrie. Richard With est un héros ; la « route rapide » – « hurtig gruten », en norvégien – est née.
Le « MS Trollfjord » amarré à Oslo. © DR
Oslo, 2024. « 130 ans après Richard With, nos navires continuent d’offrir leurs loyaux […] Lire la suite