La mesure vise à « faire reculer l’immigration irrégulière » dans un contexte de forte poussée du parti d’extrême droite AfD. L’Allemagne va étendre à toutes ses frontières les contrôles, a annoncé, lundi 9 septembre, le gouvernement d’Olaf Scholz sous pression pour durcir sa politique d’asile. « Nous continuons d’appliquer notre ligne dure contre l’immigration irrégulière », a fait valoir la ministre de l’intérieur Nancy Faeser en évoquant de nouvelles mesures.
Des contrôles temporaires avec la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Belgique et le Danemark vont être mis en place pendant six mois à partir du 16 septembre, détaille un communiqué du ministère de l’intérieur. Ils s’ajouteront aux contrôles déjà en place aux frontières avec la Pologne, la République tchèque, l’Autriche et la Suisse.
Berlin juge le renforcement des contrôles nécessaire pour « la protection de la sécurité intérieure contre les menaces actuelles du terrorisme islamiste et de la criminalité transfrontalière », deux semaines après l’attentat de Solingen revendiqué par le groupe Etat islamique. Le ministère de l’intérieur a informé avoir notifié ces nouveaux contrôles aux autorités de l’Union européenne (UE), s’agissant de mesures exceptionnelles sur le territoire de l’UE dont Bruxelles doit être avisé. L’Autriche a déjà prévenu qu’elle « n’accepterait pas les personnes refoulées d’Allemagne », selon des propos du ministre de l’intérieur, Gerhard Karner au quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung.
L’attentat de Solingen dans les esprits
Depuis le triple meurtre au couteau de Solingen, dont l’auteur présumé est un Syrien de 26 ans qui aurait dû être expulsé, la coalition de M. Scholz affiche sa volonté de fermeté en matière de contrôle de l’immigration. Dans la foulée de cette attaque, le gouvernement a annoncé la suppression des aides aux demandeurs d’asile entrés dans un autre Etat de l’UE avant d’aller en Allemagne.
Berlin veut aussi accélérer l’expulsion de réfugiés ayant fait l’objet d’une condamnation pénale. L’Allemagne a ainsi procédé fin août au renvoi dans leur pays de 28 Afghans condamnés pour crimes, pour la première fois depuis le retour au pouvoir des talibans en août 2021. Il y a un an, elle avait déjà renforcé ses contrôles aux frontières dans un contexte de forte hausse du nombre de demandes d’asile.
Le social-démocrate M. Scholz, qui gouverne avec les Verts et les libéraux, s’est targué dimanche d’avoir « réalisé le plus grand changement de ces dix ou vingt dernières années dans la gestion de l’immigration », revendiquant ce durcissement après la politique d’accueil incarnée par l’ex-chancelière conservatrice Angela Merkel.
L’opposition conservatrice (CDU) presse depuis plusieurs jours le gouvernement de recourir plus largement à cette pratique très controversée consistant à renvoyer des demandeurs d’asile dans le pays de l’UE par lequel ils sont arrivés, sans leur permettre de déposer une demande d’asile en Allemagne. Berlin dit avoir élaboré une solution juridique « conforme au droit européen » que Mme Faeser doit détailler mardi.
Aussi, la politique d’asile et d’immigration est revenue au centre des débats en Allemagne avec la forte poussée du parti d’extrême droite AfD qui a obtenu des résultats records lors de deux élections régionales début septembre. Un nouveau parti de gauche, l’Alliance Sahra Wagenknecht (BSW), qui réclame un contrôle plus étroit des flux migratoires, a aussi effectué une percée spectaculaire pendant ces élections.
Au cours de la crise migratoire de 2015-2016, la première économie européenne a accueilli plus d’un million de réfugiés, dont de très nombreux Syriens. Depuis l’invasion russe de février 2022 en Ukraine, l’Allemagne a pris en charge environ un million d’exilés ukrainiens ayant fui leur pays.