vendredi, mars 21

En salles ce mercredi, la nouvelle version de « Blanche-Neige » en prises de vue réelles arrive précédée d’une foule de polémiques.
Sans renverser la table, le film de Marc Webb se distingue par la réécriture du mythe du prince charmant.
Pour le reste, ce divertissement grand public doit son supplément d’âme à sa vedette, l’excellente Rachel Zegler.

Il était une fois un film dézingué par une partie du public avant même le premier clap du réalisateur. En 2016, Disney officialisait l’adaptation en prises de vue réelles de Blanche Neige, l’un de ses premiers chefs-d’œuvre réalisé en 1937 par David Hand. Une formule déjà testée et approuvée par le grand public avec d’autres classiques de la firme aux grandes oreilles ces dernières années comme Alice au pays des merveilles, Cendrillon, Le Livre de la jungle, ou encore Le Roi Lion et son préquel Mufasa qui a cartonné à Noël. Un coup sûr, a priori.

De fil en aiguille, la réalisation est confiée à Marc Webb, le jeune réalisateur doué de 500 jours ensemble et des deux Spiderman avec Andrew Garfield, et l’écriture à Erin Cressida Bona, une scénariste à laquelle on doit des long-métrages bien plus « adultes » comme La Secrétaire, Fur ou encore Chloé, le remake du drame érotique français Nathalie. Leur association allait-elle dynamiter le conte des frères Grimm à la manière du sombre Blanche-Neige et le chasseur avec Kristen Stewart et Charlize Theron en 2012 ?

Un procès en « wokisme » de Disney ?

Le 22 juin 2021, les réseaux sociaux s’embrasent à l’annonce du choix de Rachel Zegler pour interpréter Blanche-Neige. D’origine colombienne par sa mère et polonaise par son père, cette comédienne et chanteuse américaine a littéralement crevé l’écran dans le remake de West Side Story par Steven Spielberg. Mais pour une poignée d’internautes enragés, le choix d’une star latino serait motivé par le virage « woke » de la maison de Mickey, déjà marqué par l’apparition du premier personnage gay de son Histoire dans La Belle et la Bête ou encore l’apparition sur la plateforme Disney+ de messages recontextualisant les stéréotypes de Dumbo, Peter Pan ou encore Les Aristochats.

C’est à ce titre que le comédien britannique Peter Dinklage pousse un coup de gueule en janvier 2022. Dans une interview au podcast WTF, la star de Game of Thrones reproche à Disney de perpétuer les clichés sur les personnes de petite taille en voulant de nouveau raconter « cette histoire arriérée à propos de sept nains vivant ensemble dans une grotte ». Ajoutez à ça le débat récurrent autour du « baiser d’amour éternel » du prince à l’héroïne endormie et vous comprenez pourquoi la promesse d’un grand divertissement familial sans prétention s’est transformée en casse-tête créatif et marketing pour Disney. 

Le fameux baiser n’a pas disparu, mais…

Signe de l’embarras supposé de la major : une avant-première modèle réduit à Los Angeles la semaine dernière, l’interdiction pour Rachel Zegler et Gal Gadot, qui incarne la méchante reine-sorcière, de répondre aux questions susceptibles de relancer les polémiques sur le tapis rouge, et un film montré à la dernière minute aux journalistes dont nous faisons partie. On nous faisait craindre le pire… et pourtant. Loin de renverser la table, le film de Marc Webb est une adaptation relativement fidèle, dans l’ensemble, au dessin-animé que tout le monde connaît.

Après une enfance heureuse au Château, Blanche Neige est privée de sa mère par la maladie, puis de son père quelque temps après l’entrée en scène de sa belle-mère qui transforme ses paisibles sujets en méchants soldats. Et l’innocente en domestique obéissante… jusqu’au jour où celle-ci prend la défense de Jonathan, un brigand venu chiper des pommes de terre dans le garde-manger royal. Agacée par les velléités sociales de sa belle-fille, elle la prend carrément en grippe lorsque son miroir magique lui annonce qui est la plus belle des deux. Vous connaissez la suite avec le chasseur chargé de la tuer, les sept nains chez qui elle trouve refuge et bien sûr la pomme empoisonnée.

Si le scénario d’Erin Cressia Bona s’autorise plusieurs libertés sans réelle conséquence avec le déroulement du film de 1937, la principale réside dans le parcours sentimental de Blanche-Neige. Le mythique prince charmant n’a pas été remplacé par un brigand sans esprit chevaleresque pour rien et la relation entre les deux personnages se veut plus égalitaire. En clair, l’amour n’est pas une fin en soi pour l’héroïne qui cherche avant tout à s’émanciper de sa diabolique belle-mère. Attention spoiler : le fameux baiser n’a pas disparu. Mais il est amené d’une manière inédite qui laisse penser qu’il est consenti. À vous de juger.

Pour le reste, ce Blanche-Neige 2025 est un grand film mainstream que les parents iront voir par nostalgie et leurs enfants pour découvrir une histoire qui fascine depuis des générations. Les chansons sont entraînantes, les décors et les costumes superbes et les sept nains numériques plus cartoonesques que bien méchants. En revanche, si Gal Gadot en fait tonnes pour faire oublier Charlize Theron, c’est à Rachel Zegler qu’on doit le petit supplément d’âme de cette grosse machine. Tour à tour naïve, fragile et révoltée, elle confirme qu’elle est l’une des comédiennes les plus douées de sa génération. N’en déplaise aux haters.

>> Blanche-Neige de Marc Webb. Avec Rachel Zegler, Gal Gadot, Andrew Burnap. 1h49. En salles ce mercredi.


Jérôme VERMELIN

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