samedi, novembre 16
Jim Hoagland, rédacteur en chef adjoint au « Washington Post », au World Policy Conference, à Marrakech, 13 octobre 2019.

Il appartenait à ce qui passait alors pour l’aristocratie du journalisme américain : les « correspondants à l’étranger ». Et dans cette tribu, Jim Hoagland, mort le 4 novembre, à Washington, à l’âge de 84 ans des suites d’une attaque, fut un prince.

Le moment compte. Du début des années 1960 au printemps des années 2000, il assiste à la fin de la guerre froide, quand monte l’espoir, de l’Afrique du Sud à l’Europe de l’Est, d’une libéralisation politique générale – et peut-être d’un ordre mondial inspiré par le meilleur de l’Amérique. Ce sont aussi des temps pré-réseaux sociaux quand les grands journaux pèsent encore.

A Washington, Paris, Londres ou Beyrouth, en ces années-là, la signature Hoagland, au bas d’un article du Washington Post, est la garantie d’une information puisée aux meilleures sources. C’est aussi le regard éclairé, posé, élégamment sceptique, d’un familier des questions internationales. Ses pairs ne s’y trompent pas : la carrière modèle de Jim Hoagland lui vaut deux prix Pulitzer. « A Washington, il était aussi bien informé de la politique étrangère qu’un Bob Woodward l’était de la politique intérieure », dit le journaliste Philippe Labro, qui fut un ami.

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Né et élevé à Rock Hill, en Caroline du Sud, Jimmie Lee Hoagland a grandi dans une terre de ségrégation : « C’était une époque où il était difficile de croire que les choses pouvaient changer. Et pourtant elles ont changé. » En 1971, alors qu’il est basé en Afrique de l’Est, une série d’articles sur l’apartheid sud-africain lui vaut son premier Pulitzer. Plus tard, quand on lui demande quelle personnalité politique l’a le plus impressionné de toute sa carrière, il répond « Nelson Mandela », raconte Alain Minc, un autre de ses amis parisiens.

Des liens profonds avec la France

Il entre au Post en 1966 au moment où le journal entend se développer à l’étranger et rivaliser avec le New York Times. Il est nommé à Nairobi puis à Beyrouth, enfin à Paris. Tout avait commencé par un CV en forme d’ode à l’ascenseur social à l’américaine. Avec l’aide de fondations diverses, le jeune homme impécunieux étudie à l’université en Caroline du Sud puis à New York et passe une saison à l’université d’Aix-Marseille. Viennent ensuite un job de reporter junior au Rock Hill Evening News, puis deux ans de service militaire sur une base de l’US Air Force en Allemagne, un stage à l’International Herald Tribune à Paris, enfin, en 1966, l’embauche au Washington Post, dans la capitale fédérale.

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