dimanche, mai 19
Frank Stella, à New York (Etats-Unis), en février 2019.

Le peintre américain Frank Stella est décédé d’un lymphome le 4 mai, à New-York à l’âge de 87 ans. Il était l’un des artistes les plus exposés de sa génération aux Etats-Unis, il fut aussi l’un des plus discutés.

Il naît le 12 mai 1936 à Malden (Massachusetts) dans une famille aisée et cultivée, sa mère ayant suivi une formation artistique et son père étant médecin. Après la Phillips Academy d’Andover (Massachusetts), il entre à l’université de Princeton, en est diplômé en 1958. Sa peinture est alors, comme celle de la plupart de ses contemporains, dans le style de Willem de Kooning (1904-1997) et Franz Kline (1910-1962), avant que la découverte de Jasper Johns, en 1958, ne le détourne d’un expressionnisme abstrait devenu banal.

La mise en cause est rapide et brutale. En 1959, dans son atelier du Lower East Side, tout en gagnant sa vie comme peintre en bâtiment, il exécute ses premières « black paintings » : des surfaces entièrement couvertes de bandes noires parallèles, séparées par de très fines zones non peintes.

Une surface régulière et muette

Aucune allusion à la réalité, aucune dimension symbolique : il n’y a à voir qu’une surface régulière et muette. Les titres ajoutent leur obscurité : par exemple The Marriage of Reason and Squalor (« le mariage de la raison et de la pouillerie »). Or l’œuvre ainsi nommée est aussitôt achetée par le Museum of Modern Art de New-York (MoMA). Le succès de Stella est foudroyant. Exposé dès 1959 dans les galeries Tibor de Nagy et Castelli, il figure peu après au MoMA dans la sélection Sixteen Americans supposée annoncer une nouvelle génération.

A juste titre, pour ce qui le concerne. Son abstraction ostensiblement méthodique et exécutée avec une précision mécanique a d’autant plus d’écho qu’après sa période noire, il introduit deux nouveautés : un chromatisme de plus en plus intense et la technique du « shaped canvas » qui consiste à peindre sur des toiles ni rectangles ni carrées. Les bords zigzaguent ou dessinent trapèzes et octogones, les angles sont rentrants et la surface est parfois évidée en son centre. Frank Stella multiplie les variations qu’autorisent ces innovations, tout en continuant à donner des titres dépourvus de sens, tirés de la géographie ou de l’histoire.

Ainsi s’impose-t-il vite comme le jeune maître renversant les plus anciens, précurseur en cela du minimalisme. Il participe à des expositions manifestes, Geometric Abstraction au Whitney Museum en 1962, Toward a New Abstraction au Jewish Museum en 1963 et Post-Painterly Abstraction au Los Angeles County Museum en 1964, celle-ci ayant pour commissaire le critique Clement Greenberg, qui passe alors pour l’oracle de l’avant-garde. Le couple que Frank Stella forme avec la critique Barbara Rose, qu’il épouse en 1961, incarne la modernité new-yorkaise.

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