jeudi, octobre 10

Le procès des viols de Mazan vient éclairer une nouvelle fois l’ampleur des violences sexuelles au sein de nos sociétés et interroge leur rapport avec des dysfonctionnements de plusieurs ordres : social, conjugal et familial. Il soulève notamment la question du lien entre ces viols et l’histoire, ainsi que l’environnement relationnel dans lequel certains des accusés ont grandi. Il n’est évidemment pas question de se placer « du côté » des auteurs en justifiant leurs actes, mais d’apporter des éléments de compréhension issus de la pratique clinique et corroborés par la littérature scientifique.

Certains accusés des viols de Mazan – dont l’accusé principal – disent avoir subi des violences dans l’enfance – dont des violences sexuelles – et/ou ont grandi dans des familles incestueuses. Ces éléments biographiques rejoignent les récits des patients que nous, professionnels soignants, rencontrons sur des dispositifs pour mineurs et adultes auteurs de violences sexuelles. Nous prenons en charge des hommes, dans la grande majorité des cas, le plus souvent dans le cadre de soins pénalement ordonnés avant ou après une condamnation pour des infractions à caractère sexuel.

La plupart de ces patients ont connu des violences émotionnelles, verbales, physiques ou sexuelles, conformément à ce qu’on retrouve dans la littérature : cette population présente un taux de victimation plus élevé que la population générale, mais aussi plus élevé que la population des délinquants non sexuels. Dans leurs parcours, on constate une large proportion de violences conjugales ou d’autres formes de vulnérabilité familiale comme, par exemple, des parents présentant des troubles psychiatriques ou des addictions. Ces différentes formes de violences sont le plus souvent cumulées. Il est important de préciser qu’une minorité seulement des personnes qui ont subi de telles violences deviennent à leur tour des auteurs de violences sexuelles.

Environnements relationnels perturbés

Pour les cliniciens, la dimension incestueuse est centrale pour comprendre la trajectoire des auteurs de violences sexuelles : soit qu’ils aient été eux-mêmes victimes dans leur enfance, soit qu’ils aient grandi, ou qu’un ou deux de leurs parents aient grandi, dans une famille incestueuse. Ces familles sont en effet caractérisées par la nature profondément transgressive des liens qui unissent les membres les uns aux autres : elle remet en cause l’inscription des sujets dans des liens de filiation et d’affiliation structurants. Les futurs auteurs de violences sexuelles ont un rapport perturbé à eux-mêmes, à l’autre et à la loi. Ils ont grandi dans des environnements relationnels perturbés, mais ce contexte familial n’est pas forcément identifié comme tel par eux, leurs proches ou bien par les professionnels des différentes institutions (écoles…) qu’ils ont fréquentées.

Il vous reste 47.74% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version