Le ministère public a réclamé mercredi une peine de 30 ans de réclusion criminelle contre Cédric Jubillar pour le meurtre de son épouse Delphine, qui a disparu fin 2020. La défense de l’accusé dénonce un « dossier vide ». Le verdict est attendu vendredi.
Une peine de trente ans de réclusion criminelle a été requise, mercredi 15 octobre, à l’encontre de Cédric Jubillar, jugé à Albi pour le meurtre de son épouse Delphine, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020.
Devant la cour d’assises du Tarn, l’avocat général Pierre Aurignac a demandé la condamnation du peintre-plaquiste de 38 ans et requis « une réponse pénale extrêmement ferme » pour le « meurtre aggravé » de Delphine née Aussaguel, 33 ans, dont le corps n’a jamais été retrouvé.
« Il est coupable »
« Il est coupable », a auparavant déclaré Nicolas Ruff, le premier avocat général à s’exprimer jeudi après-midi. « Je prononce ces mots qui accusent, en en assumant pleinement les conséquences et en espérant vous convaincre de condamner Cédric Jubillar », a-t-il conclu, au terme de deux heures de réquisitoire.
« Au bout du chemin, je n’ai aucun doute sur le fait que Delphine Aussaguel est morte » le soir du 15 décembre 2020, « je n’ai aucun doute sur le fait que c’est Cédric Jubillar qui l’a tuée », a-t-il affirmé , estimant que les jurés devraient eux aussi parcourir le même chemin, en se posant « les mêmes questions ».
Descendu dans le prétoire pour s’adresser « uniquement » à la cour et aux jurés, Nicolas Ruff, vice-procureur de Toulouse, les a appelés à ne pas rendre une « justice des on-dit », une « justice des certitudes fainéantes », dans un dossier qui a vu « le pire de ce que peut être la médiatisation ».
Sans hausser le ton, regardant régulièrement l’accusé et sa défense, Nicolas Ruff s’est défendu d’être un « mercenaire de l’accusation », affirmant livrer son « analyse factuelle et juridique d’un dossier ».
Et si l’absence du corps de Delphine Jubillar « rend votre travail judiciaire plus compliqué », a-t-il dit aux jurés, « elle n’empêche pas la justice de travailler » et « on doit condamner quand il y a des éléments qui convergent », a-t-il insisté.
Reprenant le leitmotiv qui a guidé la défense, à savoir celui d’un « dossier vide », il a égrené pendant plus de deux heures les principaux éléments de l’enquête, les précédant de la formule : « Dire que ce dossier est vide, c’est ne pas voir… ».
« Un moment de bascule » la nuit du 15 décembre 2020
Au sujet de la nuit de la disparition, il a rappelé que l’enquête sur le couple et ses relations montrait que Delphine était ce soir-là « heureuse comme jamais, euphorique même », parce que la femme de son amant venait d’accepter la perspective d’une séparation, ce qui ouvrait la voie à cette nouvelle vie à deux dont rêvait l’infirmière de 33 ans.
« S’il y a un soir où il y a pu avoir ce moment de bascule, ces mots qui tuent, cet instant fatidique qui vient sceller la rupture, c’est bien ce 15 décembre », a ainsi déclaré l’avocat général, estimant, comme les parties civiles, que le meurtre a été commis à la suite de l’annonce d’un « départ définitif » de la part de Delphine.
Lunettes brisées de la disparue, cris d’effroi entendus par les voisines, témoignage de son fils Louis, téléphone éteint de l’accusé, voiture garée dans un sens démontrant qu’elle a été utilisée dans la nuit, attitude de Cédric Jubillar le lendemain matin… Nicolas Ruff a inlassablement décortiqué les indices du dossier.
Loin du « désastre judiciaire » annoncé par la défense si leur client était condamné, Nicolas Ruff a estimé que ces indices démontraient, au contraire, que « Cédric Jubillar est coupable du meurtre de Delphine Aussaguel ».
Rendez-leur Delphine ! »
Dans la matinée, les deux derniers avocats des parties civiles, plaidant dans l’intérêt des enfants du couple Jubillar, se sont une nouvelle fois directement adressés à l’accusé.
« Rendez-leur Delphine ! », a par deux fois tonné Me Laurent Boguet en concluant sa plaidoirie, l’accusé ne trahissant aucune émotion face à cette injonction.
Me Boguet a dénoncé le « brouillard de guerre » déployé par l’accusé, via ses réponses imprécises, et la défense, qui a « torturé le dossier » pour le remettre en question.
D’une voix chargée d’émotion, sa consoeur Malika Chmani a regretté que les enfants Jubillar n’aient « jamais eu de réponses à leurs questions » au cours des quatre semaines de procès.
« Il n’y a pas eu de vérité de leur père, je suis venue chercher une vérité judiciaire », a conclu à la barre l’avocate, demandant « vérité et justice pour Louis et Elyah ».
La journée de jeudi va être consacrée aux plaidoiries de la défense, avant le verdict attendu vendredi.
Avec AFP



