lundi, mai 13

S’il est expérimenté, le plaisancier repère immédiatement que ce bateau n’est pas comme les autres. Tout est dans la forme du moteur, à la poupe : plus fin, et manifestement plus léger. Le signe particulier des embarcations 100 % électriques que l’on commence à apercevoir le long des côtes. C’est à la fin de l’année 2020, durant la pandémie de Covid-19, que deux entrepreneurs de Barcelone se sont jetés à l’eau, François Jozic, cofondateur de Brunch Elektro, et Mathieu Quintart, fondateur de la plate-forme d’immobilier touristique Cocoon Holidays.

Rêvant de posséder un bateau propre et silencieux, ils s’étaient étonnés de n’avoir le choix qu’entre une coquille de noix électrique et une embarcation puissante, certes, mais au prix astronomique. Avec dans les deux cas un moteur de secours à essence. Les deux hommes se sont dit qu’il y avait un marché à conquérir, avec des bateaux en tout-électrique « élégants, efficaces et abordables ». Ils ont alors lancé la société Magonis, clin d’œil au nom originel du port de l’île de Minorque, aux Baléares (Espagne). Prix d’entrée catalogue : 45 000 euros.

« Pour l’instant, la décarbonation du transport maritime relève surtout du marketing », estime Aurelio Alarcon, directeur technique de Magonis. « Les grands constructeurs navals expérimentent des tas de choses, tout en conservant une propulsion à combustion. Nous, avec nos bateaux alimentés exclusivement par des batteries, nous témoignons du tout début d’une nouvelle ère qui va bouleverser le secteur, comme l’a connu la téléphonie mobile il y a vingt ans. » Dans l’atelier de la start-up catalane, en banlieue de Figueras, dans la province de Gérone (Espagne), cinq bateaux sont en cours de finition. Ils mesurent 5,50 mètres de long et leur moteur, selon les modèles, offre une puissance de 6, 12 ou 35 kilowatts. De quoi naviguer à une vitesse maximale de 22 nœuds (environ 40 km/h). En atteignant une vitesse de 8 ou 9 nœuds, le bateau dispose d’une autonomie de quatre heures. Pas de quoi faire le tour du monde…

Il faut dire que le transport maritime, responsable de près de 3 % des émissions de CO₂ dans le monde, presque autant que le transport aérien, a pris du retard. Dix ans après la voiture et l’avion, le bateau, absent de l’accord de Paris de 2015 sur le changement climatique, est tout juste en train de prendre conscience de l’effort qu’il va devoir fournir. « C’est un secteur qui, pendant longtemps, n’a pas été régulé, du fait de sa nature internationale », rappelle Inesa Ulichina, spécialiste de la décarbonation du transport maritime à l’organisation non gouvernementale Transport & Environnement. Auxiliaires-clés du commerce mondialisé, au même titre que les camions, les navires de fret transportent 80 % des marchandises de la planète et sont aujourd’hui près de 110 000 à sillonner les mers, selon l’application qui suit le trafic maritime mondial en temps réel, MarineTraffic.

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