mardi, octobre 22

La vice-présidente Kamala Harris est entrée officiellement en campagne pour l’investiture démocrate ce lundi.
Avant la convention de son parti en août à Chicago, elle a déjà reçu le soutien de plusieurs rivaux potentiels.
Tous les voyants semblent déjà au vert en vue d’un duel en réalité déjà lancé face à Donald Trump.

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Élection présidentielle américaine

Le hasard fait parfois bien les choses. Au lendemain de l’annonce du retrait de Joe Biden, c’est depuis les jardins de la Maison Blanche que Kamala Harris a fait sa première apparition en tant que candidate à l’investiture démocrate, lundi 22 juillet. L’hôte des lieux forfait pour cause de Covid, sa vice-présidente était chargée de donner le coup d’envoi d’une cérémonie célébrant les programmes sportifs universitaires. Allait-elle évoquer le dernier coup de théâtre d’une campagne électorale qui n’a pas fini surprendre ? 

Après avoir donné des nouvelles rassurantes de la santé du 46ᵉ président des États-Unis, elle a clairement corrigé son discours pour lui rendre hommage. « L’héritage de Joe Biden au cours de ces trois dernières années est inégalable dans l’Histoire moderne« , a-t-elle notamment déclaré. « En un mandat, il a dépassé l’héritage de bien des présidents qui ont fait deux mandats. » Et c’est à peu près tout, l’ancienne procureure générale de Californie préférant louer les qualités humaines du sortant que d’entrer dans le dur de son programme. Sans doute parce qu’avant de briguer le suffrage des électeurs, elle doit d’abord convaincre son camp. 

La convention démocrate, une formalité ?

Avant que Joe Biden renonce, Kamala Harris était une alternative crédible pour de nombreux experts de la politique américaine. Mais pas davantage que certaines stars montantes du parti démocrate comme le gouverneur de Californie Gavin Newsom, le ministre des Transports Pete Buttigieg… ou encore une certaine Michelle Obama. Dans un sondage publié début juillet, l’ex-First Lady était la seule personnalité démocrate en mesure de battre Donald Trump. Sauf que depuis dimanche, la vice-présidente n’en finit plus de recevoir des soutiens de poids.

Après Joe Biden lui-même, puis les époux Clinton dimanche, toute une série de gouverneurs démocrates ont officiellement annoncé leur ralliement ce lundi. Le Californien Gavin Newsom donc, son homologue du Michigan Gretchen Whitmer, Wes Moore du Maryland, Andy Beshear du Kentucky, J.B. Pritzker de l’Illinois ou encore Josh Shapiro de Pennsylvanie. Autant de « jeunes loups » qui renoncent, de fait, à participer à un vote lors de la convention de leur parti en août prochain à Chicago. Dernier soutien de poids en début de soirée : celui de l’influente Nancy Pelosi, ex-présidente de la Chambre des représentants.

Kamala Harris ce lundi 22 juillet dans les jardins de la Maison Blanche. – AFP

Seule ombre au tableau : la « réserve » de Barack Obama. Dans son message saluant la décision de Joe Biden dimanche soir, l’ancien président ne mentionne pas le nom de Kamala Harris. Vingt-quatre heures plus tard, les médias américains guettent sa prochaine prise de parole. Aurait-il un autre visage en tête quand il rêve de la première femme présidente des États-Unis ? Si le parti démocrate semble dérouler le tapis rouge à la vice-présidente, c’est peut-être aussi pour une question de timing. Et parce qu’elle coche toutes les cases pour affronter Donald Trump.

 À 59 ans, Kamala Harris donne un soudain « coup de vieux » à l’homme d’affaires républicain. Et puis elle maîtrise les dossiers, après bientôt quatre ans dans l’ombre de Joe Biden. Enfin, son expérience de procureure est savoureuse face à celui que Hillary Clinton qualifie de « repris de justice ». Si Donald Trump assurait dimanche soir qu’elle serait « plus facile à battre« , le camp républicain a bien conscience qu’il va devoir repenser sa stratégie.

Les Républicains repensent leur stratégie

On peut en avoir un avant-goût dans une vidéo postée dès dimanche soir par l’influente chaîne Youtube MAGA Inc. Archives à l’appui, la discrète Kamala Harris y est accusée d’avoir dissimulé la réalité sur la santé de Joe Biden et d’avoir dirigé le pays à sa place. Le résultat : une crise de l’immigration illégale sans précédent, une inflation qui explose, plombant le pouvoir d’achat et conduisant à la mort du Rêve américain. Une rhétorique reprise ce lundi par de nombreux élus républicains sur les plateaux de télé et par leurs soutiens sur les réseaux sociaux.

Des soutiens, Kamala Harris n’en manque pas non plus. Dimanche soir, le groupe spécialisé dans les levées de fonds ActBlue estimait avoir déjà levé près de 47 millions de dollars en faveur de sa campagne – un record depuis le début de l’année – venant principalement de petits donateurs. Les plus gros sont eux de retour, après avoir appelé au retrait de Joe Biden en coulisses. C’est le cas ce lundi du fondateur d’Open Society Alex Soros, le fils du milliardaire George Soros, du cofondateur de LinkedIn Reid Hoffman ou encore de Roger Altman, fondateur de la banque d’investissement Evercore. 

Reste à savoir si cet enthousiasme retrouvé va se répercuter dans les intentions de vote. Selon un récent sondage, Kamala Harris ferait mieux que Joe Biden face à Donald Trump dans le Michigan et en Pennsylvanie, deux États qui pourraient faire basculer l’élection. Le premier est dirigé par Gretchen Whitmer, le second par Josh Shapiro. Deux noms évoqués, parmi d’autres, pour constituer le ticket démocrate de novembre. Le choix ne sera pas anodin pour tenir tête à J.D. Vance, l’auteur best-seller Hillbilly Elegy ayant été choisi par le candidat républicain pour lui donner une assise plus « rurale ».

L’entrée en scène de Kamala Harris – ou d’un autre candidat démocrate – est-il de nature à rebattre les cartes auprès d’un électorat plus polarisé que jamais ? Interrogé sur CNN ce lundi, le réputé politologue Norman Ornstein estimait que la clé du scrutin était sans doute entre les mains des indécis qu’il surnomme les « double haters ». « Ils détestaient Trump et ils détestaient Biden« , résumait-il. « Désormais ils sont ‘single haters’. Et ils ne demandent qu’à être séduits. »


Jérôme VERMELIN

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