« Il reste peu de temps avant le début des Jeux [olympiques de Paris, JO]. Nous nous sommes réunis et la priorité de Rayssa, c’est vraiment la préparation, l’entraînement, et passer du temps avec sa famille. Finalement, on ne répondra aux questions que par e-mail », envoie l’attachée de presse à 19 h 16, six jours avant la date programmée de l’interview. Le journaliste fulmine, mais l’humain comprend. Après tout, Rayssa Leal, médaillée d’argent en skate street – épreuve reproduisant les éléments d’une rue – aux Jeux de Tokyo en 2021, n’a que 16 ans.
Seize ans, dont déjà neuf passés sous les projecteurs. Tout est allé si vite pour la native d’Imperatriz, dans l’Etat nordestin du Maranhao, le plus pauvre du Brésil. Nous sommes le 7 septembre 2015. La gamine au teint hâlé, robe bleu ciel, collants blancs et fausses ailes accrochées dans le dos, vient de participer à un défilé pour la fête de l’indépendance du pays. Mais elle n’a qu’une envie, aller « aux escaliers », monter sur son skate et « arriver à faire un heelflip ». Comprendre : faire tourner sa planche à 360 degrés sur un axe longitudinal.
La fillette, déjà championne nationale à l’époque, réussit du premier coup ! Un moment immortalisé en vidéo par sa mère, Liliane Leal, qui postera les images dans la foulée sur Instagram. Le lendemain, Tony Hawk, légende vivante de la discipline, partageait le clip – « Je n’ai aucune information sur ça, mais j’adore : un heelflip de conte de fées au Brésil par #RayssaLeal » – qui accumule instantanément des millions de vues. Rayssa Leal accède à la célébrité, gagnant par la même occasion le surnom de « Fadinha », la « petite fée » du skate.
Racontée à l’envi par tous les médias du pays, l’histoire est depuis longtemps connue des Brésiliens. Elle est désormais utilisée à des fins commerciales, comme dans une publicité pour l’opérateur téléphonique Vivo, où, aux côtés des athlètes vedettes Vinicius Junior (football), Gabriel Medina (surf) et Rafaela Silva (judo), Rayssa Leal explique que « [s]a plus grande victoire, c’est d’inspirer des nouveaux contes de fées dans le monde entier ».
« J’avais toujours ce petit palpitement dans le ventre »
Star du jour au lendemain, cette fille d’une caissière et d’un laveur de carreaux aligne désormais les contrats de sponsoring (Nike, Louis Vuitton, Monster Energy…). Rayssa Leal fait partie de la même génération qu’Endrick, jeune talent brésilien du foot promis au Real Madrid depuis ses 16 ans.
Mais elle marche également dans les pas de la gymnaste américaine Simone Biles, 27 ans, qui s’était mise en retrait lors des JO de Tokyo, pour préserver sa santé mentale. La « petite fée », elle, ne cache pas avoir recours aux services d’un psychologue, à qui elle parle des « commentaires négatifs » la concernant sur les réseaux sociaux, ou encore de sa « nervosité » avant les épreuves, qu’elle affirme avoir réussi à vaincre.
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