Avec sa comédie « Un p’tit truc en plus » Artus a signé l’un des succès de l’année au cinéma.
Ce film phénomène sur le handicap dépasse les 10 millions d’entrées.
Le comédien et réalisateur s’est confié à Audrey Crespo-Mara sur ce que cette aventure humaine a changé dans sa vie.
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Sept à huit
Quatre, puis six, et dorénavant 10 millions d’entrées : la comédie « Un p’tit truc en plus », réalisé par Artus, également à l’affiche du film, est un phénomène. Une nouvelle que l’humoriste savoure. « Je suis en lévitation. Je suis devenu accro à mon portable parce que l’application me dit si on fait des entrées, si les gens ont toujours envie d’y aller. Il y a ce côté un peu stressant de se dire : ‘je ne veux pas que les gens se lassent, je veux qu’ils continuent à aller le voir' », explique-t-il à Audrey Crespo-Mara dans la vidéo en tête de cet article, replay du « Portrait de la semaine » de « Sept à Huit » diffusé ce dimanche.
De là à prendre la grosse tête ? « Il faudrait demander à mes proches, mais je ne crois pas », répond-il tout de go. On aurait été étonné du contraire. Tant cette aventure semblait être en lui depuis longtemps. Déjà enfant, quand on demandait à Artus ce qu’il voulait faire une fois grand, il répondait inlassablement : « promener des handicapés dans des parcs ». « Ce n’est pas un vrai métier, je crois. Je ne sais pas pourquoi. J’ai toujours été attiré par ces gens qui ont un petit truc en plus, ce côté simple dans le bon sens du terme, c’est-à-dire qu’il n’y a pas les barrières sociales, les codes qu’on s’est mis nous (…) Ils n’ont pas ce sourire hypocrite qui est un sourire de valide. Eux, ils ne savent pas faire ça et tant mieux. Ça fait un bien fou, ce rapport humain simple », ajoute-t-il.
Dans tous les handicaps qui touchent la tête, c’est fou de se rendre compte qu’il y a toujours un rapport à l’enfance et à rester dans cette bulle d’enfance.
Dans tous les handicaps qui touchent la tête, c’est fou de se rendre compte qu’il y a toujours un rapport à l’enfance et à rester dans cette bulle d’enfance.
Artus
Rien de plus naturel donc pour Artus de porter ce regard nouveau et tendre sur le handicap mental. « Dans tous les handicaps qui touchent la tête, c’est fou de se rendre compte qu’il y a toujours un rapport à l’enfance et à rester dans cette bulle d’enfance. Ça me touche parce que je pense que j’ai un peu ce truc-là. L’angoisse de vieillir, ce truc de devenir adulte. Il y a une phrase de Jacques Brel que j’aime beaucoup qui dit : ‘pour qu’on devienne vieux sans être adulte’. Je trouve que c’est ça, c’est chiant de devenir adulte », affirme-t-il.
Et quand le handicap mental est le plus souvent caricaturé à l’écran, « Un p’tit truc en plus » prend le parti de rire avec les personnes handicapées, et non à leurs dépens. Car ici, les deux « valides« , joués par Clovis Cornillac et Artus, en sont pour leurs frais. Père et fils à l’écran, ils incarnent deux malfrats à la petite semaine qui se mettent en tête de braquer une bijouterie. Pour échapper à la police, il ne leur reste qu’une seule chance : monter dans le bus qui emmène en colonie de vacances un groupe de jeunes porteurs d’un handicap mental.
Artus se fera passer pour un pensionnaire, mais se fera très vite griller, donnant des scènes de pure comédie. Une démarche saine pour le réalisateur. « Je trouve qu’il faut rire de nos différences. C’est une vraie force qu’il faut assumer. Moi, pendant très longtemps, j’ai été très gros et au contraire, il faut en rire », assure-t-il.
Le film était un pari pour Artus, davantage connu jusqu’ici comme une figure de l’humour et du petit écran, incarnant déjà des handicapés dans des sketchs. Le succès lui donne raison. Cette aventure humaine l’a aussi profondément changé. « Ça ne peut que changer les gens quand on arrive sur un tournage comme ça. Déjà, quand on arrive le matin et qu’on s’est pris la tête avec sa femme, qu’il y avait des bouchons sur la route ou des petits problèmes et qu’il y a Soso (alias Sofiane Ribes) en fauteuil qui malheureusement a une maladie compliquée et qu’il a la banane, eh bien en fait, tes petits problèmes, tu les prends et tu te les mets où tu veux. On ne peut que relativiser. Et ils ont tellement une joie de vivre quand ils arrivent sur le plateau, honnêtement, je pense que c’était plus simple de faire ce film avec 11 acteurs en situation de handicap qu’avec 11 acteurs. Il n’y a pas d’ego, tout va bien, la vie est belle », explique-t-il.
Parrain des Jeux paralympiques et depuis des années de Handicap International, Artus espère maintenant que son film va changer les regards. « Les retours que j’ai des spectateurs et des gens vont dans ce sens-là. Il y a des associations aussi qui ont plus de dons. J’espère, parce qu’en France, on est un peu en retard (…) », souffle-t-il. Son vœu le plus cher : que l’effet ne se limite pas au succès du film. Et que l’un de ses acteurs « chope une nomination aux Césars ».