La géolocalisation continue de faire débat.
Certains parents l’utilisent pour toujours savoir où se trouvent leurs enfants.
Une pratique pourtant déconseillée par les psychologues.
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Le 13H
En anglais, un proverbe dit : « Better safe than sorry. » Ce qui se traduit littéralement par « mieux vaut se sentir en sécurité que désolé », sorte d’équivalent de notre « mieux vaut prévenir que guérir ». Une logique ancestrale que suivent les parents toujours plus nombreux à utiliser des applications mobiles de géolocalisation, initialement destinées à retrouver des objets perdus, pour suivre en temps réel les déplacements de leurs enfants en âge de quitter seuls le domicile familial. Au moins quatre parents sur dix y auraient déjà eu recours, tandis que leurs téléchargements augmentent de 30% par an.
« Depuis qu’elle est en 6ᵉ, j’en utilise une pour être sûr qu’il ne lui arrive rien et, s’il lui arrive quelque chose, pouvoir la localiser à ce moment-là », synthétise le père d’une fille de 11 ans, interrogé par TF1 dans le reportage du JT visible en tête de cet article. « J’utilise la géolocalisation. Je mets des AirTags (des traceurs de marque Apple, ndlr) dans les sacs de mes enfants. Je sais où ils sont et quand ils rentrent », confie un autre papa, croisé dans les rues de Lyon (Rhône)..
On l’aura compris : ces dispositifs rassurent les parents. Mais pour quel impact sur leur progéniture ? « À un moment donné, malheureusement, on tombe dans la surveillance. Et lorsqu’il y a de la surveillance et que l’enfant, lui, a besoin de s’autonomiser pour grandir, il n’est plus libre de faire sa propre expérience », répond face à notre caméra la psychologue lyonnaise Jennifer Lafont Cassan.
Sa consœur, Virginie Lalo, spécialiste des pratiques numériques, que TF1 avait interrogée il y a un peu moins d’un an , considère même que « c’est une erreur de vouloir surveiller en permanence ses enfants », parce que « ça les empêche de se construire avec leur espace propre. On ne va pas pouvoir négocier les règles parentales (sortir un peu plus tard, aller voir les copains, ne pas rentrer tout de suite après l’école…) avec le lien de confiance qui va avec, puisqu’on va avoir directement le tracking des parents. Et ce qui est important à l’adolescence, c’est d’avoir ces espaces sans les parents ».
Ces applications privent aussi les enfants d’une forme de liberté, comme « avoir le droit de se tromper, faire l’école buissonnière, mentir un peu à ses parents », et « c’est dommageable », développait la psychologue. Pour qui « c’est en expérimentant qu’on apprend. Un enfant qui se trompe de sens, de route ou qui prend le mauvais bus, va pouvoir expérimenter son regard sur le monde et ses interactions avec autrui, par exemple en demandant son chemin à quelqu’un. Aujourd’hui, on a de plus en plus peur de laisser les enfants s’autonomiser, pour plein de raisons liées à des faits divers et autres. Mais, que ce soit eux ou leurs parents qui s’inquiètent, ça va les empêcher de se construire correctement ». Parfois, mieux vaut donc ni prévenir, ni guérir.