Alors que les stations de moyenne montagne sont en grande difficulté, celles situées en altitude sont plébiscitées.
Les constructions de nouveaux logements ne cessent de se multiplier, et les prix atteignent des sommets.
TF1 s’est rendu à l’Alpe d’Huez, où cette frénésie immobilière ne fait pas que des heureux.
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LE WE 20H
Rolland Roche ne reconnaît plus sa station et tient à nous le montrer. « Là, c’était de l’herbe pour les bovins », décrit-il dans le reportage de TF1 ci-dessus, « en deux ans, c’est passé de zone agricole à zone de construction ». L’Alpe d’Huez, qui se situe à 1.800 mètres d’altitude, est l’une des plus hautes stations de France. Et c’est aussi un chantier permanent : 4.000 nouveaux lits ont été construits ou sont en voie de l’être, en plus des 30.000 existants.
Pour Rolland, ancien moniteur de ski, cela semble ne jamais devoir s’arrêter. « Je suis tellement écœuré de ma station, parce que je suis né ici, et vu dans l’état où c’est, j’aime mieux m’en aller », soupire-t-il. Construire est le nouveau credo des stations de haute montagne, qui ces cinq dernières années ont vu leur fréquentation augmenter. Car l’altitude est la garantie pour les skieurs d’y trouver de la neige.
On a déjà perdu un mois d’enneigement dans les Alpes et pour chaque degré de réchauffement supplémentaire, on va perdre un mois de plus.
On a déjà perdu un mois d’enneigement dans les Alpes et pour chaque degré de réchauffement supplémentaire, on va perdre un mois de plus.
Marie Dumont, chercheuse au Centre d’étude de la neige
À l’Alpe d’Huez (Isère), on prévoit cinq nouvelles télécabines, plus des canons à neige. Des projets jugés bien trop gourmands : le plan local d’urbanisme a été retoqué deux fois par le tribunal administratif, qui le juge incompatible avec la préservation des ressources. Mais le maire (LR) assume, sa station doit assurer l’avenir de son village, quitte à aller chercher la neige encore plus haut. « Là, on est à 1800 mètres (…), on prépare déjà le fond de neige de 2100 mètres », d’ici à 20 ou 30 ans, confirme Jean-Yves Noyrey au micro de TF1.
Mais l’or blanc a-t-il autant d’avenir, justement ? Une climatologue le confirme, d’ici à 50 ans, même en altitude, l’enneigement ne sera plus garanti. « La neige, elle fond plus tôt, et comme il y en a moins, elle va fondre plus vite et elle va disparaître plus tôt », explique la chercheuse Marie Dumont, « donc en gros, on a déjà perdu un mois d’enneigement dans les Alpes et pour chaque degré de réchauffement supplémentaire, on va perdre un mois de plus ».
On sait très bien que plus on artificialise, plus il y a de risques d’inondations, de crues torrentielles »
On sait très bien que plus on artificialise, plus il y a de risques d’inondations, de crues torrentielles »
Guillaume Desrues, maire (SE) de Bourg-Saint-Maurice
À Saint-Martin-de-Belleville (Savoie), située à 1500 mètres, on ne skie déjà plus que sur de la neige artificielle. Et pourtant, ses chalets de luxe sont très convoités. Un agent immobilier nous a ouvert les portes de l’un d’entre eux, acheté il y a quelques mois par une famille britannique. Celui-ci s’est vendu sur plan, à 3,5 millions d’euros. À 10.000 euros le mètre carré, c’est plus élevé qu’un prix parisien.
Le manque de neige freine-t-il les acheteurs ? « Oui, ça pose question », admet la professionnelle, mais « pour le moment, ce n’est pas encore très alarmant pour les personnes qui veulent acheter ici ». Pour d’autres, en revanche, il est temps de s’inquiéter. C’est le cas aux Arcs (Savoie), où pendant 50 ans, on a bétonné pour attirer les skieurs en masse. Mais il y a cinq ans, coup de frein : fini les nouveaux permis de construire. C’est le maire (SE) de Bourg-Saint-Maurice, dont dépend la station, qui l’a décidé.
« On sait très bien que plus on artificialise, plus il y a de risques d’inondations, de crues torrentielles », justifie Guillaume Desrues au micro de TF1, « et la deuxième chose, c’est au niveau du domaine skiable, qui est un espace contraint, qu’on ne va plus pouvoir étendre non plus de manière illimitée ».
Certains promoteurs testent aussi une autre solution que l’extension du parc immobilier : la surélévation sur des surfaces déja construites. Grâce à la vente des nouveaux appartements, le promoteur finance les travaux d’isolation de tout l’immeuble. Dans les stations, 40% des logements sont occupés moins de trois semaines par an. Alors, rénover l’ancien plutôt que de construire du neuf, l’idée semble germer. Mais pour l’instant à Courchevel (Savoie), seulement cinq immeubles ont été surélevés.