samedi, décembre 27

Quand la mairie ressemble à une affaire de famille. À Notre-Dame-du-Pé, près de Sablé-sur-Sarthe, comme à Hannonville-Suzémont, en Meurthe-et-Moselle, le fauteuil de maire se transmet de génération en génération, entre passion pour la politique locale et lassitude croissante des élus.

Aux manettes de Notre-Dame-du Pé, un village de 700 habitants tout près de l’ancien fief de François Fillon, on trouve Claude Davy (sans étiquette) presque 70 ans et une histoire très politique derrière lui.

« J’ai épousé la fille du maire en 1978 et après tout s’est enchaîné », sourit Claude Davy.

Maire comme papa et papi

Cinq ans après cette union, ce sera son tour de faire ses premiers pas à la mairie. Au début des années 80, les élus sortants le désignent par scrutin secret pour entrer au conseil municipal, comme le permettait à l’époque le code électoral. Au dépouillement, son nom sort à plusieurs reprises: le voilà propulsé conseiller municipal.

Sans que la greffe ne soit manifestement difficile à prendre.

« Rentrer au conseil municipal, c’est faire preuve d’esprit civique et d’engagement républicain. J’ai grandi dans ce climat-là et j’ai un peu attrapé le virus », nous explique celui qui a travaillé successivement dans une imprimerie, une poterie puis un collège.

Le virus, lui, circule depuis longtemps dans la famille. Son propre père fut maire d’une commune voisine, Daumeray, pendant des années. Quant à sa grand-mère, elle avait son frère maire, son père puis son grand-père, là encore dans la même commune.

« Pas toujours facile »

Même atmosphère pour les enfants de Claude Davy. Ses deux filles sont elles-mêmes élues municipales dans d’autres villages. En remontant dans l’arbre généalogique, on découvre même que le grand-père de son épouse a été élu maire en 1947. Mais ma situation n’a pas toujours été facile.

« Il faut savoir faire la part des choses quand votre beau-père est maire et que vous travaillez ensemble au sein du conseil municipal. Honnêtement, ça n’a pas toujours été facile », observe l’édile.

En mars prochain, c’est décidé. Claude Davy raccroche les gants pour passer du temps avec son épouse et profiter de ses dix petits-enfants. C’est donc la fin, pour l’instant en tout cas, de l’histoire de sa famille à la mairie.

« On retrouve beaucoup de filiation dans le monde des élus locaux », observe le sociologue Rémy Le Saout.

« Dans votre enfance, vous allez avoir une socialisation à la politique, à l’action locale qui vous donne une connaissance de cet univers et peut vous pousser à vous lancer », explique ce professeur de l’université de Nantes.

« Tout le temps sollicité pour des broutilles »

À Hannonville-Suzémont, entre Metz et Verdun, l’histoire familiale est tout aussi marquée… mais elle touche aussi à sa fin. Le maire, Didier Noël, a décidé de ne pas se représenter.

Son arrière grand-père fut maire dans les années 1920, son grand-père a pris le flambeau dans les années 40 avant que son propre père ne se lance dans le bain des municipales en 1983. Son tour arrive en 2014. Et pourtant Didier Noël s’était promis de ne pas faire lui-même de politique.

« J’avais vu ce que ça représentait: les gens qui sonnent à la porte parce qu’ils ont une photocopie à faire et qu’ils considèrent que c’est le boulot des élus de les dépanner. Mon père était tout le temps sollicité pour des broutilles », explique cet agriculteur céréalier.

Refus du flambeau

Mais, faute de volontaire, Didier Noël accepte finalement d’entrer au conseil municipal dans les années 1990. En 2014, rebelote: aucun habitant d’Hanonville-Suzémont n’est pas partant pour devenir maire. L’exploitant accepte finalement la mission et sera réélu en 2020. Aujourd’hui, il estime avoir fait sa part.

« J’ai l’impression d’avoir donné tout ce que je pouvais. Je n’ai plus autant de punch qu’avant et un peu de sang neuf ne fera pas de mal », sourit l’édile.

La rélève sera-t-elle assurée par sa propre descendance? Pas encore pour l’instant. « Mes enfants ont vu leur père beaucoup travailler pour la commune et je pense qu’ils aspirent à autre chose », estime Didier Noël. Sans perdre espoir: « peut-être qu’un jour, ils en auront eux aussi envie ».

Article original publié sur BFMTV.com

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