Tribune. La fragmentation territoriale est la première cause de déclenchement de conflits militaires dans le monde, pour l’essentiel instrumentalisés par des puissances rivales. L’Europe peut douloureusement le constater depuis 2014, date de la proclamation de républiques séparatistes qui ont largement contribué au discours justifiant l’invasion de l’Ukraine par son voisin russe en février 2022.
Or, bien que l’Europe et la France fassent preuve d’une fermeté sans faille dès lors que des séparatismes apparaissent sur leur continent – comme en Catalogne ou en Ukraine –, cette détermination est sacrifiée sur l’autel des intérêts géo-économiques sur l’autre rive de la Méditerranée. La question du Sahara marocain, bien que capitale pour la sécurité de l’Europe et de la France, fait malheureusement l’objet de ce double standard.
Conflit de basse intensité opposant le Maroc et l’Algérie – qui abrite et arme le front séparatiste du Polisario – depuis le milieu des années 1970, le différend saharien est le fruit d’un double héritage : la guerre froide et une décolonisation bâclée dans la sous-région.
Sur le plan juridique, la marocanité du Sahara ne souffre aucun débat. Au-delà de l’exercice de la « beia » (allégeance), la souveraineté du royaume sur le Sahara est attestée depuis des temps immémoriaux par le recrutement historique et régulier des Sahraouis au sein de l’armée marocaine et aussi par les « dahirs », ces actes édictés par le sultan pour exercer son pouvoir. A cet égard, le roi du Maroc nommait les « caïds » et les « pachas », représentants du pouvoir exécutif, ainsi que les « cadis », représentants du pouvoir judiciaire, dans l’ensemble du territoire y compris le Sahara sous domination espagnole. Les archives coloniales de la France comme de l’Espagne en attestent de manière incontestable.
Double peine
En toute logique, le Maroc réclame légitimement, depuis son indépendance, toutes les parties de son territoire qui ont été occupées par les colonisateurs. Dès 1957, le Maroc a soulevé devant la commission de tutelle de l’assemblée générale des Nations unies la question du rattachement au Maroc du « Rio de Oro », ancienne dénomination du Sahara marocain. Mais la France mettra un terme à la première tentative du royaume de récupérer son territoire à travers la funeste opération « Ecouvillon », en 1958, quand l’Hexagone vint prêter main-forte militairement à une Espagne exsangue.
En 1975, la Cour internationale de justice enfonce le clou en reconnaissant l’existence de « liens juridiques d’allégeance entre le sultan du Maroc et certaines des tribus vivant sur le territoire du Sahara occidental ». Depuis, bien qu’il soit dans son droit et qu’il ait entrepris un formidable effort de développement de la zone, le royaume du Maroc a exprimé en 2007 sa volonté de clore définitivement le dossier en soumettant aux Nations unies une proposition de large autonomie. Cette forme d’autodétermination a depuis été reconnue par de multiples résolutions de l’ONU comme une « base sérieuse et crédible » pour le règlement de la question saharienne.
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