Ces dernières années, les débats politiques ont accordé une place centrale au terme « souveraineté ». Une souveraineté multifacette : économique, militaire, numérique, technologique… Mais jamais environnementale, alors qu’elle devrait l’être en tout premier lieu. Les Etats n’ont-ils pas un droit légitime à ce que, dans ce domaine critique de l’environnement, les mauvais choix des uns ne s’imposent pas aux autres ?
On dit souvent l’Europe faible, en particulier dans ses relations commerciales. Elle vient d’en donner un contre-exemple – passé relativement inaperçu – dans deux domaines stratégiques : les batteries et les panneaux solaires photovoltaïques.
Par une décision historique, à l’initiative de la Commission européenne, le Parlement et le Conseil européens viennent en effet d’imposer à tous les acteurs mondiaux de ces deux secteurs industriels de mesurer et de déclarer, dès le 1er janvier 2024, selon une méthode imposée, l’empreinte environnementale de leurs produits. A défaut, ils ne franchiront pas les frontières de l’Union européenne (UE).
Des seuils minimaux
Mieux, ils devront, à compter du 1er juillet 2027, respecter des seuils minimaux. Le but ? Exclure progressivement les produits les plus dommageables pour l’environnement.
Pourquoi cet exemple doit-il nous interpeller ? Parce qu’il traduit un sursaut de l’Europe pour sa souveraineté environnementale dans deux secteurs industriels, ultra-dominés d’ailleurs par l’industrie chinoise, qui se voient imposer des critères de performance environnementale, rigoureusement mesurés selon une méthode, le PEF (Product Environmental Footprint), fruit de dix années d’un travail scientifique exemplaire faisant désormais l’objet d’une recommandation officielle l’affirmant comme cadre méthodologique de référence.
C’est là une juste barrière que dresse l’UE à ses frontières, en distinguant, et donc en protégeant, les acteurs véritablement vertueux, notamment les acteurs européens qui ont déjà adopté le PEF et initié une vraie transition écologique. Elle ne doit pas s’arrêter en si bon chemin.
Sa main ne doit pas trembler devant les lobbys de tout poil qui gravitent autour de la Commission pour empêcher, dans le cadre de deux textes en cours d’examen par le Parlement et le Conseil – le nouveau règlement sur l’écoconception (Ecodesign for Sustainable Products/ESPR en anglais) et l’encadrement des allégations environnementales (« Green claim initiative ») –, l’extension des exigences environnementales basées sur le PEF à tous les autres secteurs industriels. La Commission ne doit pas renoncer à sa volonté initiale d’imposer un cadre méthodologique unique à tous les Etats membres.
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