Kiev annonce la création d’un centre international pour enquêter sur l’agression russe de l’Ukraine

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L’Ukraine a franchi une nouvelle étape dans son combat judiciaire avec la création, dimanche 5 mars, du Centre international pour la poursuite du crime d’agression (CIPA). Le CIPA, parquet intérimaire formé de magistrats, est une première étape vers la création d’un tribunal spécial qui pourrait, à l’avenir, juger les auteurs de l’agression russe contre l’Ukraine. C’est du moins le vœu de l’Ukraine.

A Lviv, du 3 au 5 mars, procureurs et ministres européens ou américains se sont réunis à l’occasion de la conférence United for Justice. La Cour pénale internationale (CPI), qui a ouvert une enquête sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis sur le territoire de l’Ukraine il y a un an, n’a pas compétence pour s’emparer du crime d’agression, car ni Kiev ni Moscou n’ont ratifié son traité. L’idée d’un tribunal spécial chargé de juger l’agression russe avait été lancée par l’avocat franco-britannique Philippe Sands, le 28 février 2022 dans le Financial Times, quatre jours après le début de l’invasion russe. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, avait approuvé l’idée lors de la découverte du massacre commis par les troupes russes à Boutcha, en avril 2022.

« Notre union pour la justice doit devenir un élan puissant pour l’adoption du projet de résolution [de soutien à un tribunal spécial] par l’Assemblée générale des Nations unies », a déclaré Volodymyr Zelensky lors de la conférence de Lviv. Le projet de résolution, destiné à obtenir le feu vert d’un maximum de membres de l’ONU, est débattu depuis la mi-novembre 2022. Passage obligé, estiment de nombreux juristes, pour que ce tribunal soit établi sur des bases de légitimité solides, sachant qu’il ne reconnaîtrait pas l’immunité attachée aux dirigeants, dont jouissent le président russe Vladimir Poutine et son ministre de la défense, Sergueï Choïgou.

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Equipe d’enquête commune

Les Ukrainiens tentent de convaincre leurs alliés de les appuyer dans cette perspective. Mais la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne s’opposent à une telle juridiction, dont la création pourrait ouvrir la voie à des processus judiciaires de même nature concernant d’autres cas d’agression, comme l’invasion de l’Irak en 2003. Ces pays rejettent aussi l’idée de confier à des procureurs le soin de définir les modalités des futures guerres. Ce sont eux qui, avec la Russie et bien avant le conflit en Ukraine, se sont appliqués à limiter les prérogatives de la Cour pénale internationale (CPI) sur le crime d’agression.

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En attendant la création éventuelle de ce tribunal, le CIPA fonctionnera sous la tutelle d’Eurojust (l’Agence de l’Union européenne en matière de coopération judiciaire). Fin mars 2022, une équipe d’enquête commune a été créée en son sein pour enquêter sur les crimes commis en Ukraine. Sept pays européens en font aujourd’hui partie, dont l’Ukraine, en qualité de membre rattaché à Eurojust, la Pologne, la Lituanie, l’Estonie, la Lettonie, la Slovaquie et la Roumanie. Les magistrats de ces pays peuvent mutualiser leurs preuves et fluidifier leur coopération judiciaire. Le ministre américain de la justice, Merrick Garland, venu en Ukraine pour la conférence, a signé un mémorandum pour permettre la coopération judiciaire des Etats-Unis avec l’équipe commune. Les travaux du CIPA devraient démarrer à La Haye au cours de l’été.

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