Figure de l’opposition syrienne en exil, la politologue franco-syrienne Bassma Kodmani est morte jeudi 2 mars à Paris, à l’âge de 64 ans, des suites d’une longue maladie. Ancienne porte-parole de la principale plate-forme anti-Assad, elle a consacré l’essentiel de sa carrière à la démocratisation du monde arabe, en multipliant les initiatives au carrefour des mondes universitaire, politique et militant.
« Bassma était toujours pleine de projets, c’était une institution à elle seule », a confié au Monde Salam Kawakibi, le directeur de la branche parisienne du Centre arabe de recherches et d’études politiques, qui l’a secondée dans beaucoup de ses batailles et partagé avec elle la brûlure de l’échec de la révolution syrienne. « Bassma a été une mère, un mentor, une amie pour beaucoup d’entre nous », a réagi sur Twitter Mazen Gharibah, un jeune chercheur syrien installé à Londres.
Bassma Kodmani naît en 1958, à Damas, dans une famille appartenant à la grande bourgeoisie nationaliste sunnite. Son père est diplomate, pénétré des idéaux panarabes du parti Baas, futur tremplin de Hafez Al-Assad vers le pouvoir. Sa mère est la nièce de Jamil Mardam Bey, l’un des grands acteurs de la lutte pour l’indépendance de la Syrie.
Défense de la cause palestinienne
La vie de la famille bascule après la débâcle arabe dans la guerre des Six-Jours contre Israël, en 1967. Pour avoir suggéré devant son ministre de tutelle que le gouvernement devrait démissionner, le père est expédié six mois en prison. A sa sortie, il s’enfuit au Liban avec femme et enfants, avant de rejoindre Londres puis Paris.
C’est là que Bassma étudie les sciences politiques, au tournant des années 1970-1980, un parcours couronné par une thèse de doctorat consacrée aux réfugiés palestiniens. D’abord chercheuse à l’Institut français des relations internationales puis à la Fondation Ford, elle fonde en 2005 l’Arab Reform Initiative, un groupe de réflexion travaillant sur la question de la transition démocratique en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.
Durant ces années, la défense de la cause palestinienne est l’un des fils rouges des activités de Bassma Kodmani, dont le premier mari est un journaliste palestinien, Nabil Darwich. Mais à la minute où la révolution syrienne éclate, en mars 2011, son pays natal la rattrape. En octobre 2021, elle devient la porte-parole et la responsable des relations extérieures du Conseil national syrien, qui regroupe des opposants libéraux, des Frères musulmans et des militants de terrain.
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