Malgré la mobilisation enthousiaste de la jeunesse en faveur d’une alternative à la classe politique traditionnelle, Bola Ahmed Tinubu, 70 ans, le candidat du Congrès des progressistes (APC, majorité sortante), a remporté le scrutin présidentiel au Nigeria, a annoncé, mercredi 1er mars, la Commission électorale nationale indépendante (INEC). Le nouveau président a pris « [son] tour » à la tête du pays, selon l’expression qu’il avait lui-même utilisée en juin 2022. Considéré comme le « parrain » de la politique nigériane, M. Tinubu a été élu avec 8 794 726 voix (35 % des suffrages), devant Atiku Abubakar, le candidat du Parti démocratique populaire (PDP), qui a engrangé 6 984 520 voix (28 %). Quant au troisième homme de la campagne, l’outsider Peter Obi, qui représentait le Parti travailliste (LP), il a rassemblé 6 101 533 d’électeurs (24 %).
Le scrutin présidentiel s’était déroulé le 25 février dans un calme relatif, mais les multiples incidents logistiques qui ont émaillé les opérations de vote et de comptage des voix ont nourri les inquiétudes sur d’éventuelles manipulations. Avant même la proclamation des résultats, l’opposition avait dénoncé des fraudes « massives ».
Dès l’annonce de sa victoire, M. Tinubu s’est pourtant montré rassembleur. Il a promis d’être « un leader juste » et a tendu la main à ses critiques ainsi qu’à une jeunesse avide de changement, qui s’était mobilisée autour de la candidature du « troisième homme », Peter Obi. « Je suis conscient que pour beaucoup d’entre vous, le Nigeria est devenu un lieu de défis permanents qui limite votre capacité à imaginer un avenir radieux », a notamment déclaré le nouveau chef de l’Etat. « Je vous ai bien entendu, je comprends votre peine, vos espoirs pour une meilleure gouvernance, une économie fonctionnelle et une nation sûre qui vous protégera et protégera votre futur », a promis M. Tinubu, qui invite les Nigérians « à travailler ensemble » pour « faire avancer le pays. »
« Fin stratège »
Bola Ahmed Tinubu est « tout sauf un président hésitant ou accidentel, mais quelqu’un de très préparé pour le pouvoir », insiste Olutayo Adesina, enseignant d’histoire à l’Université d’Ibadan. Pendant des années, l’ancien gouverneur de Lagos (entre 1999 et 2007) a patiemment consolidé ses réseaux, et bâti une fortune colossale, à l’origine controversée. « Fin stratège », « négociateur hors pair » , ce Yoruba musulman est connu pour son flair, qui lui a permis de repérer et de pousser la carrière de nombreux politiciens, qui lui sont redevables à vie.
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