L’arrestation de Pavel Durov, le patron de Telegram, que nous vous révélions le 24 août dernier, a créé une déflagration.
Depuis son interpellation à son arrivée au Bourget, il a été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire.
Nous vous dévoilons aujourd’hui les coulisses de son interpellation et ce que ce patron de la tech controversé a déclaré en garde à vue.
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Le patron de Telegram arrêté en France
Depuis des mois, les enquêteurs français traquaient son jet privé. Ils ont pisté le trajet de son Embraer Legacy 600 et passé au crible les habitudes de vie, l’entourage, les endroits fréquentés par le milliardaire de 39 ans ayant fait fortune en développant notamment la messagerie cryptée Telegram. Depuis mars 2024, une juge d’instruction a émis un mandat de recherche et Pavel Durov figurait au fichier des personnes recherchées (FPR).
Ce 24 août au matin, une alerte sonne sur les téléphones des policiers : Pavel Durov est enregistré sur un plan de vol depuis Bakou (Azerbaïdjan) vers Le Bourget. Un dispositif d’interpellation se monte, mais il faut encore que la présence du milliardaire à bord soit confirmée. Dans l’après-midi, l’information tombe : il est bien à bord.
Son interpellation
À sa descente d’avion, rien qui ne sort de l’ordinaire pour un milliardaire. Aucun policier à vue, Pavel Durov récupère ses bagages et se dirige vers le salon VIP de l’aéroport du Bourget. À ses côtés, se trouvent son assistante (très active sur Instagram et qui n’hésite pas à poster des photos de ses déplacements avec Durov) et son garde du corps de nationalité roumaine. Le trio est alors installé dans le salon réservé habituellement aux VIP le temps des vérifications d’identités. Là, des premiers policiers de la PAF (Police aux frontières) arrivent. Les fonctionnaires les invitent à monter à l’étage. Et c’est à cet instant que le « piège » se referme. Les policiers lui notifient ses droits et précisent qu’à cette heure, il est placé en garde à vue. « Il n’en revenait pas », commente une source. Son assistante et son garde du corps sont, eux, exempts de cette mesure de garde à vue. Ils seront toutefois entendus librement dans le cadre de l’enquête. Aucune charge ne sera retenue contre eux.
Comment se déroule la garde à vue ?
Avant de passer près de quatre-vingt-dix heures dans les locaux du nouvel office, l’ONAF (office national anti-fraude), Pavel Durov demande à faire prévenir le milliardaire français et figure de la tech tricolore, Xavier Niel. Contacté, celui-ci n’est pas revenu vers nous pour l’heure. Face aux enquêteurs, le natif de Saint-Pétersbourg se montre tantôt « hautain« , tantôt « désinvolte« .
L’entourage d’Emmanuel Macron dément auprès de TF1-LCI tout projet de rencontre
Au-delà de sa langue maternelle, qui est le russe et à part quelques mots de français, le patron de Telegram est bilingue anglais et italien. Il explique être venu en France « pour rencontrer Emmanuel Macron ». Une déclaration que l’entourage d’Emmanuel Macron dément auprès de TF1-LCI.
Il a été entendu à plusieurs reprises sur, et uniquement sur, les chefs d’inculpation détaillés par la procureure de Paris dans son communiqué. Autrement dit, il n’a jamais été interrogé sur les soupçons de violences contre ses enfants. Cette affaire fait l’objet d’une procédure annexe dont les investigations sont confiées à l' »Office mineurs » de la police. Son ex-femme qui réside encore en Suisse devrait être entendue.
Que sait-on sur sa naturalisation ?
À la faveur de cette affaire, la question de la nationalité du magnat de la tech originaire de Saint-Pétersbourg surgit. À la justice, il a remis ses quatre passeports : russe, français, émirati et un émanant de l’île caribéenne de Saint-Kitts-et-Nevis.
Selon nos informations, son dossier de naturalisation comporte de nombreux tampons rouges « demande refusée ». Bien que « Pavel Durov ne remplisse aucun critère correspondant à une demande de naturalisation française », détaille une source, il est naturalisé français par décret du 23 août 2021. Le 25 août de la même année, cette décision est publiée au Journal officiel.
Le 1ᵉʳ avril suivant, il s’en amuse sur sa chaine Telegram : « Je vais devoir franciser mon nom en mettant Paul du Rove ».
À propos de la procédure dont Pavel Durov a bénéficié, rarement engagée et en général à l’initiative du Quai d’Orsay, ce dernier nous fait savoir : « Nous ne commentons pas les cas particuliers ». De son côté, l’Élysée, répondant à TF1-LCI, nous indique « qu’il n’y a pas de commentaire à faire sur les cas individuels de naturalisation« . Une source proche du dossier ajoute qu’il s’agit « d’une procédure qui relève du ministère des Affaires étrangères et du ministère de l’Intérieur, conformément aux dispositions de l’article 21 – 21 du Code civil ».
Pavel Durov ne peut désormais plus quitter la France. Il est sous contrôle judiciaire lourd, prévoyant un cautionnement de cinq millions d’euros, un pointage au commissariat deux fois par semaine, et l’interdiction de quitter le territoire français.
L’instruction débute tout juste. Les enjeux pour les enquêteurs seront de matérialiser les infractions, de prouver comment Durov participe à la complicité des infractions et à leur commission. Cela peut s’étaler sur dix-huit mois. Pendant ce temps, son contrôle judiciaire s’appliquera et Durov restera en France. « Sauf s’il nous fait une ‘Carlos Ghosn' », plaisante une source. « Sans passeports et avec une valise, ça s’est déjà vu de quitter un pays !« .