mardi, mai 21
Shari Redstone, PDG de Paramount, à Philadelphie (Etats-Unis), le 27 octobre 2023.

A l’occasion d’un festival du film à Londres en 2021, Jesse Armstrong, le créateur britannique de la célèbre série télévisée Succession, a reconnu s’être inspiré de la vie des deux plus spectaculaires empereurs des médias de la deuxième moitié du XXe siècle, Rupert Murdoch et Sumner Redstone. Son intérêt a été éveillé par leur blague commune quand on les interrogeait sur leur succession à eux : « Nous ne prévoyons pas de mourir. » Rupert Murdoch a 93 ans et Sumner Redstone s’est éteint en 2020 à l’âge de 98 ans.

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Le patron du géant Viacom-Paramount, propriétaire des chaînes CBS, MTV, Nickelodeon, de l’éditeur Simon & Schuster (vendu depuis), le producteur de Titanic, de Bob l’éponge ou du Parrain, propriétaire de salles de cinéma dans le monde entier, ne s’est jamais trop préoccupé de « l’après ». De sa fille Shari, il disait qu’elle n’avait eu « aucune contribution à ses affaires ». C’est désormais elle qui dirige et s’apprête à vendre l’empire.

Elle est en négociation avancée pour la vente de la holding de tête de l’entreprise, la National Amusements Inc. (NAI), fondée par son grand-père en 1936 pour rassembler les cinémas de plein air qu’il achetait en Nouvelle-Angleterre. Celle-ci détient 80 % des droits de vote du groupe, appelé désormais Paramount.

Raviver un géant

Et comme dans les meilleures séries télé, l’acheteur est lui aussi un héritier écrasé par l’ombre de son père, David Ellison, le fils du fondateur d’Oracle et multimilliardaire Larry Ellison. Raillé à ses débuts, le « fils de » a développé le producteur Skydance, qui peut s’enorgueillir du succès des récents films de Tom Cruise Top Gun Maverick ou le dernier Mission impossible. Epaulé par le financier KKR, le chinois Tencent et bien sûr l’argent de papa, il veut fusionner Skydance avec Paramount pour raviver un géant qui a sérieusement décliné ces dernières années.

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Les dizaines de chaînes du réseau Viacom souffrent du déclin de la télévision câblée, tandis que le lancement de sa chaîne de streaming Paramount + grève les pertes du groupe. Fâcheux pour Shari Redstone, dont la société NAI cumule les dettes et voit fondre les dividendes de sa filiale. Ce lundi 29 avril, elle a mis dehors le placide Bob Bakish, vétéran de l’entreprise qui la gérait depuis 2016.

Le seul hic de l’affaire est que NAI contrôle Paramount, mais ne possède que 10 % des actions. Les autres actionnaires n’entendent pas être les dindons de la farce. L’exclusivité des négociations s’achève le 3 mai et déjà le fonds Apollo est en embuscade pour surenchérir. Il n’y a pas que chez Bolloré et Lagardère que les successions sont intranquilles. La fièvre des médias n’a pas fini de saisir les héritiers du monde entier.

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