samedi, mai 18

Dans les discussions sur la « fin de vie », n’oublions pas que, à la base, c’est la personne, mortelle, qui est en question : chacune, chacun est confronté à sa propre souffrance, éventuelle, et à « sa » mort, inéluctable.

Pourtant, l’immense majorité des interventions dans ces débats en France sont celles du corps médical français, délivreur d’ordonnances. Les médecins sont-ils détenteurs de la vie et de la mort ? Dans le projet gouvernemental actuel, oui, bien que dans un sens inverse à celui qu’on entend habituellement par « pouvoir de vie et de mort » : à la personne qui désire mourir, ils peuvent imposer de continuer à vivre ou autoriser la mort.

Leur prise de parole est entièrement justifiée, tant par les soins qu’ils prodiguent que par leur conscience et leur « serment », le serment d’Hippocrate : « Je ne provoquerai jamais la mort délibérément », engagement symbolique puissant appuyé par le « Tu ne tueras point » biblique. Mais, concrètement, ces jeunes gens de 30 ans ont-ils ou elles réfléchi au moment où, abattus par la dégradation continue de l’âge, ils affronteront eux-mêmes le temps de l’attente se terminant de toute façon par la mort ? D’une manière générale, qu’est-ce qui permet à des personnes dans la force de l’âge ou dans une verte vieillesse de pontifier sur le sort de leurs semblables ravagés de faiblesse et proches de la mort ?

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Il est temps que les principaux concernés, grands malades, octogénaires, nonagénaires, centenaires, voient leur parole aussi largement publiée que celle des bien portants, lesquels sont en pleine possession de leurs claviers et de leurs moyens.

Le choix du moment de sa mort

Les vieux, les vieilles dont je suis puisque j’ai plus de 90 ans, sommes pliés par l’arthrose, tenaillés par des douleurs qui se multiplient, promis à la cécité ou au moins à la malvoyance. Nous sommes tassés au fond du lit médicalisé dans l’attente d’une aide-soignante surchargée de travail ; ou accueillis en famille et ressentant lourdement dans notre impuissance le poids imposé à nos aidants ; ou encore chez nous, isolés, entourés d’aides sociales mais toutes et tous accablés par la perte de l’époux, de l’épouse, de tant d’amis, de tant d’amies, et dans la crainte d’un nouvel accident renvoyant au lit de l’hôpital.

Tout cela la démarche vacillante, la vue brouillée, dans un espace de plus en plus restreint depuis la renonciation à l’automobile, se limitant pour la fin au fauteuil et au lit, enfin au lit seul. Consciente de tant d’autres douleurs que je ne connais pas, j’arrête ici.

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