Ils ne lâchent rien sur les retraites mais acceptent désormais d’aborder d’autres sujets. Mardi 16 et mercredi 17 mai, les responsables des cinq principaux syndicats ont, sans le claironner, ouvert un nouveau chapitre dans leurs rapports avec l’exécutif. Reçus à tour de rôle par la première ministre, Elisabeth Borne, ils ont redit à leur interlocutrice tout le mal qu’ils pensaient du recul à 64 ans de l’âge légal de départ, tout en exposant par le menu leurs revendications sur diverses thématiques – les salaires, en premier lieu.
C’était « une reprise de contacts », selon le mot de François Hommeril, le président de la CFE-CGC. Pour qu’elle soit durable, les leaders confédéraux ont posé leurs conditions : ils veulent de vraies avancées en faveur des travailleurs et du respect de la part du pouvoir en place.
Les protagonistes partent de « loin », comme l’a souligné Laurent Berger en s’adressant aux journalistes dans la cour de l’hôtel de Matignon, à l’issue de son rendez-vous avec la cheffe du gouvernement, qui était flanquée d’Olivier Dussopt, le ministre du travail.
« On vient de vivre six mois d’une forme de mépris à l’égard du dialogue social, des organisations syndicales », a déclaré le secrétaire général de la CFDT, faisant allusion à la préparation de la réforme des retraites puis à son adoption au forceps, envers et contre l’opinion. Il y avait donc du « ressentiment » dans l’air, selon M. Berger, quand l’échange avec Elisabeth Borne a débuté. « Je lui ai redit (…) : nous n’avons plus confiance, a pour sa part relaté M. Hommeril. Nous avons été trahis, d’une certaine façon, à l’occasion de la crise sur les retraites. » De là à s’affronter sous les ors de Matignon, il y a, bien sûr, un pas. « On ne s’est pas jeté nos verres d’eau (…) à la figure », a précisé Frédéric Souillot, le numéro un de FO : « C’était une discussion ferme, de chaque côté de la table. »
« Nous n’avons pas baissé les armes »
Tous les syndicalistes affirment avoir démarré leur prise de parole, face à la première ministre, en exprimant, à nouveau, leur hostilité au report de l’âge d’ouverture des droits à une pension. « J’ai rappelé en introduction que nous n’avions pas baissé les armes », a expliqué M. Hommeril. « Le fait de venir à cette réunion n’est pas un gage que l’on tourne la page », a renchéri son homologue de la CFTC, Cyril Chabanier.
Pour prouver que la lutte reste toujours d’actualité, les invités de la locataire de Matignon ont mentionné deux rendez-vous importants : la quatorzième journée de mobilisation contre les 64 ans, qui aura lieu le 6 juin, suivie – quarante-huit heures après – de l’examen à l’Assemblée nationale d’une proposition de loi du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT), qui entend abroger la réforme des retraites. Un texte que l’ensemble des confédérations soutiennent. S’il n’était pas examiné, « [ce] serait inacceptable », a prévenu Laurent Berger, en évoquant, en filigrane, le débat en cours sur la recevabilité de cette proposition de loi, qui est sujette à caution pour l’exécutif et sa majorité : le chef de la centrale cédétiste y voit des « manœuvres » qui ne feraient que renforcer le « sentiment de mépris » si elles aboutissaient à bloquer l’initiative des élus LIOT.
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