Qui dit durcissement dit aussi risque de déplaire. En voulant « mettre la France à l’arrêt », mardi 7 mars, à l’occasion d’une sixième journée nationale d’action contre la réforme des retraites, les huit principaux syndicats de salariés et cinq organisations de défense de la jeunesse ont décidé de « passer à la vitesse supérieure ». Au-delà des manifestations, qui s’annonçaient de très grande ampleur, la lutte doit continuer dès le lendemain sous la forme d’appels à la grève reconductible au sein de plusieurs secteurs clés comme celui de l’énergie et des transports de voyageurs. Synonyme de perturbation dans l’activité économique et de gêne pour beaucoup de personnes, cette stratégie est impulsée en faisant le pari qu’elle ne se retournera pas – en termes d’image – contre ses initiateurs.
Depuis qu’elle a lancé la contestation le 19 janvier, l’intersyndicale a la cote auprès d’une très large partie de la population. D’après un sondage réalisé du 3 au 6 mars par Toluna Harris Interactive pour RTL et pour AEF info, 72 % des individus interrogés indiquent soutenir la démarche des opposants au gouvernement, soit une proportion stable au cours des deux derniers mois. Rien d’étonnant à cela dans la mesure où les treize coalisés sont en phase avec ce que pense une nette majorité de femmes et d’hommes : les uns comme les autres sont contre le recul à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite – la mesure phare du projet.
Pour le moment, les représentants des travailleurs, des lycéens et des étudiants ont donc remporté une première bataille face à l’exécutif : celle de l’opinion publique. Cet avantage, ils le doivent aussi à la manière dont la colère s’est exprimée, avec – dans un premier temps – des cortèges impressionnants par le nombre et sans débordement.
« On a fait les choses correctement »
Comme leur demande de retrait de la réforme n’a pas été satisfaite, les protagonistes haussent aujourd’hui le ton, en suivant une démarche qui se voulait graduelle dès le départ. « Le fait d’avoir commencé dans le calme pour élever le rapport de force ensuite était la meilleure solution. Nous montrons ainsi que la tournure prise par le conflit n’est pas de notre fait », estime Benoît Teste, secrétaire général de la FSU. « Les gens voient très bien qu’on a fait les choses correctement et qu’on a donné sa chance au gouvernement », enchaîne Laurent Escure, le numéro un de l’UNSA. Codélégué général de Solidaires, Simon Duteil considère que face à un pouvoir « qui ne bouge pas », la population a compris « que le durcissement était inévitable ». « Si la perspective d’une France paralysée se confirme, la responsabilité en incombera d’abord à l’exécutif », renchérit Philippe Martinez, le leader de la CGT.
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