Les effets personnels de Pierre Mauroy, le « ministre de la retraite à 60 ans », mis aux enchères

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Il a opté pour deux paires de lunettes. Acquises pour 20 euros. Un achat symbolique pour Jean-Paul Carouge, qui « voulait absolument un objet touché par Pierre Mauroy ». L’ancien premier ministre socialiste de François Mitterrand, de 1981 à 1984, porta notamment la réforme de la retraite à 60 ans. Emblématique maire de Lille, Pierre Mauroy enchaîna cinq mandats successifs entre 1973 et 2001. Jean-Paul Carouge, une soixantaine d’années, a prévu de faire monter les lunettes à sa vue. Il vient d’envoyer un message à son fils pour lui faire part de sa trouvaille, « mais il a 22 ans, pas sûr que ça lui parle ». Il se désole que « les gens [aient] oublié ce que les socialistes ont fait quand ils étaient au pouvoir ».

Ces 22 et 23 février, dans cet ancien couvent transformé en hôtel de luxe ­lillois, où se tient la vente aux enchères de 850 objets ayant appartenu au célèbre premier magistrat de Lille, mort en 2013, et à son épouse, Gilberte, décédée en 2022, il y a beaucoup de monde. « Ça témoigne du souvenir qu’a laissé M. Mauroy », savoure Xavier Wattebled, l’un des deux commissaires-priseurs chargés de la vente par la famille.

« On voulait permettre à des gens qui les ont connus d’avoir des souvenirs de mes parents. C’est pour ça que les prix de départ des enchères sont généralement bas. » Fabien, fils unique de Pierre Mauroy

L’exposition des objets a attiré de nombreux anonymes qui racontent « un grand maire », « un homme accessible » ; des anciens collaborateurs, quelques élus locaux, aussi. Ils découvrent les « souvenirs d’une vie politique mais aussi d’une vie intime. Les Mauroy n’étaient pas des gens dispendieux qui menaient grand train », observe David Porthay, jeune commissaire-priseur.

Pendant des mois, l’associé de Xavier Wattebled a trié, classé, évalué ce que les Mauroy conservaient dans leur maison du Vieux-Lille. « On ne savait pas par où commencer. On a ouvert des armoires pleines de cadeaux encore emballés », confie Isabelle, la belle-fille de Pierre Mauroy.

Le commissaire-priseur maître Baptiste Portay, lors de la vente aux enchères des objets de Pierre Mauroy, à l’Hôtel Alliance, couvent des Minimes, à Lille, le 22 février 2023.

Si les écrits et documents politiques ont été confiés à la Fondation Jean Jaurès, la famille n’a gardé que les objets qui avaient une valeur affective. « On voulait permettre à des gens qui les ont connus d’avoir des souvenirs de mes parents. C’est pour ça que les prix de départ des enchères sont généralement bas », précise Fabien, le fils unique de Pierre Mauroy, qui s’avoue surpris de l’envolée des enchères pour certaines pièces.

Sabre, tabouret, pique-fleurs

Le premier jour de la vente a été consacré aux objets d’art qui lui ont été offerts, en tant que premier ministre, président de l’Internationale socialiste, et maire. On a ainsi vu passer un sabre d’apparat koweïtien, un tabouret avec chaufferette intégrée pour les pieds, des saucières, des œuvres d’artistes régionaux, mais aussi une aquarelle et gouache sur papier du peintre marocain Hassan El Glaoui (1923-2018), adjugée 9 200 euros à un acheteur en ligne, une marionnette en bois peint figurant un ouvrier de l’industrie textile, un pique-fleurs très kitsch en faïence représentant un coq bleu-blanc-rouge. Assis au milieu du public, Fabien Mauroy, 66 ans, dont le visage rappelle celui de son père, se souvient l’avoir vu trôner chez ses parents. « Je suis ému, quand même… » Le pique-fleurs a été acquis pour 150 euros par une dame, en fond de salle, qui prévoit de « l’offrir à quelqu’un ».

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