« Nous n’avions jamais, par le passé, dû faire face à une telle demande », reconnaît-on du côté des Banques alimentaires comme du Secours populaire, fondés respectivement en 1984 et en 1945. « On navigue en territoire inconnu », complète l’Association nationale de développement des épiceries solidaires (Andes). Les grandes associations d’aide alimentaire racontent toutes une situation qui n’en finit pas de se détériorer et qui, malgré leurs alertes des derniers mois, n’est considérée que maintenant.
Depuis l’appel à l’aide lancé dimanche 3 septembre par Les Restos du cœur, et la prise de parole de la ministre des solidarités, Aurore Bergé, les annonces se sont en effet succédé : 10 millions d’euros par la famille de Bernard Arnault (LVMH), 5 millions d’euros par TotalEnergies, environ 500 000 euros par les joueurs de l’équipe de France de football, des collectes et dons de Carrefour, Les Mousquetaires et le groupe Altice… Le Crédit mutuel, qui avait déjà fait un don de 5 millions d’euros en mars à l’association, a fait savoir qu’il versera 5 millions aux Banques alimentaires et 7,5 millions à la Croix-Rouge française, qui a elle aussi lancé un appel à l’aide, lundi 4 septembre, craignant de terminer l’année avec un déficit compris entre 45 et 50 millions d’euros.
Si les grandes associations se réjouissent de ces annonces, toutes insistent sur la nécessité d’aller plus loin. D’où viennent leurs difficultés ? L’inflation à l’œuvre depuis environ deux ans pèse doublement : « D’une part, les besoins d’aide augmentent car des personnes n’arrivent pas à faire face seules à la hausse des prix de l’alimentation, et, d’autre part, nos charges augmentent, qu’il s’agisse de payer l’énergie ou d’acheter de la nourriture », résume Barbara Mauvilain, responsable des relations institutionnelles des Banques alimentaires.
« Les chiffres ont plus que triplé »
Les besoins ont non seulement atteint un niveau historique, mais ils croissent aussi à une vitesse inédite. Les Restaurants du cœur dénombrent déjà 1,3 million de personnes inscrites à leurs distributions cette année, en hausse de 20 % par rapport au record de 2022. Les quelque 6 000 associations, centres communaux d’action sociale et épiceries solidaires auxquelles les Banques alimentaires fournissent des denrées ont accueilli 2,4 millions de personnes en 2022 et, rien qu’au premier trimestre 2023, la hausse était de 9 %. « Cela a augmenté après la crise financière de 2008, puis avec le Covid, et il n’y a jamais de reflux. Les chiffres ont plus que triplé en une dizaine d’années », constate Barbara Mauvilain. « Il y a une hausse considérable de la précarité : on accueille plus d’étudiants, plus de gens qui travaillent, plus de retraités… Et 5 % sont propriétaires de leur logement », décrit le directeur général du Secours populaire, Thierry Robert.
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