Malgré des mois de mouvements sociaux, manifestations, batailles législatives et un recours devant le Conseil constitutionnel, la réforme des retraites va entrer en vigueur, comme prévu, à partir du 1er septembre. La majeure partie des décrets d’application ont été publiés durant l’été – les autres devraient paraître entre septembre et novembre, selon l’échéancier prévu. Le point sur ce qui va changer dès à présent.
Recul de l’âge de départ à la retraite
C’est le cœur de la réforme voulue par le gouvernement, et sans doute la mesure la plus contestée, validée par le décret 2023-436 du 3 juin 2023 : l’âge de départ à la retraite à taux plein (hors cas particuliers) est décalé de deux ans, de 62 à 64 ans. Dès vendredi, les personnes nées à partir du 1er septembre 1961 devront attendre 62 ans et 3 mois pour prétendre à la retraite ; cet âge légal sera progressivement décalé de trois mois chaque année, pour atteindre 64 ans en 2030.
Le recul de l’âge de départ est aménagé pour les carrières longues : ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans pourront partir un an plus tôt que les autres, à 63 ans ; ceux qui ont débuté avant 20 ans, à 62 ans ; ceux qui ont commencé avant 18 ans, à 60 ans ; et les rares à avoir travaillé avant 16 ans, à 58 ans.
La réforme accélère aussi l’allongement de la durée de cotisation initialement prévu par la loi Touraine de 2014. Pour obtenir une retraite à taux plein, il faudra cotiser non pas quarante-deux ans, mais quarante-trois ans dès 2027, au lieu de 2035. Cette augmentation se fera aussi progressivement, sur un rythme d’un trimestre supplémentaire par an. L’annulation de la décote est maintenue à 67 ans (comme avant la réforme) pour les cotisants qui n’auront pas tous les trimestres requis.
Fin progressive de quatre régimes spéciaux
« Les régimes spéciaux ne conviennent plus à la réalité du pays », assurait Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2022. La réforme, confirmée par quatre décrets publiés le 30 juillet, met fin à plusieurs de ces situations particulières, mais seulement pour les travailleurs recrutés après le 1er septembre. Cela concerne la Régie autonome des transports parisiens, les industries électriques et gazières (comme EDF), les clercs et employés de notaires, la Banque de France et le Conseil économique, social et environnemental. Les nouveaux embauchés relèvent dorénavant du régime général, et de l’Agirc-Arrco pour leur retraite complémentaire.
Les salariés qui étaient déjà dans les effectifs avant le 1er septembre continueront à bénéficier des régimes spéciaux, en vertu de la clause dite « du grand-père ». Ils ne sont toutefois pas entièrement épargnés par la réforme : leur âge légal de départ à la retraite et la durée d’assurance imposée pour obtenir une pension à taux plein vont progressivement augmenter, mais seulement à partir du 1er janvier 2025.
Quant aux autres régimes spéciaux, ils se maintiennent. C’est le cas, par exemple, de celui de la Comédie française, de l’Opéra de Paris, des marins ou des sénateurs – qui ne peut être modifié que par le bureau du Sénat.
Revalorisation des petites pensions
Pour défendre le volet social de sa réforme, le gouvernement avait initialement laissé penser qu’aucune pension ne pourrait être inférieure à 1 200 euros net. Mais en réalité, seule une minorité des retraités concernés devraient atteindre ce montant – autour de 250 000 personnes dès cette année, auxquels il faudra rajouter chaque année 10 000 à 20 000 nouveaux retraités.
Le gouvernement assurait début août que 1,7 million de retraités bénéficieraient d’une « revalorisation de leur retraite » (sans en préciser le montant), mais que seule une partie (700 000) recevraient ces sommes dès l’automne. Les revalorisations ultérieures doivent avoir lieu au printemps 2024, avec effet rétroactif au 1er septembre 2023.
Le minimum de pension était jusqu’à présent revalorisé annuellement en fonction de l’inflation. Avec la réforme, il sera désormais indexé sur le smic. L’objectif est que la pension brute à l’issue d’une carrière complète atteigne au moins 85 % du smic net.
Le Monde
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Les habitants de Mayotte, affiliés à un régime différent, avaient été oubliés dans le projet initial du gouvernement, mais ils bénéficieront d’une revalorisation du même ordre que les petites retraites complètes grâce à un amendement du Sénat. La publication du décret relatif aux pensions mahoraises est « envisagée début septembre 2023 », selon l’échéancier du gouvernement.
Plusieurs autres dispositions
Parmi les autres mesures qui entrent en vigueur, une assurance spécifique est créée pour les aidants familiaux, sur le modèle de l’assurance vieillesse pour les parents au foyer. Cette mesure élargit la liste des personnes qui pourront obtenir des trimestres lorsqu’ils prennent un congé de proche aidant.
Entre aussi en vigueur la surcote pour les mères de famille, qui pourront engranger davantage de cotisations entre 63 et 64 ans si elles ont déjà cumulé les annuités requises pour un départ à taux plein.