Et si la voie de sortie de la crise sociale et politique majeure engendrée par la réforme des retraites et les conditions de son adoption reposait, au moins en partie, entre les mains des neuf juges du Conseil constitutionnel ?
Après que le gouvernement a engagé l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter à l’Assemblée nationale le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (PLFRSS) portant l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans, et que les deux motions de censure déposées, l’une par les députés du Rassemblement national et l’autre par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, appuyé par la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), ont été rejetées, le texte est à présent confronté à l’examen des juges constitutionnels. Et suspendu à leur décision.
Ces derniers jours ont été marqués par un regain de mobilisation des opposants à cette réforme. L’espoir de remettre le gouvernement et les partenaires sociaux autour d’une table de négociation dans l’immédiat semble faible. Une situation qui accroît les risques de dérapage. Aussi l’étape du passage devant le Conseil constitutionnel pourrait-elle être déterminante. Celui-ci a été saisi, le 21 mars, par Elisabeth Borne, par les députés du Rassemblement national, par les députés de la Nupes et par les sénateurs de gauche. Il dispose d’un mois pour rendre sa décision, la première ministre n’ayant pas usé de sa prérogative de lui demander de statuer en urgence, tout en souhaitant que le Conseil se prononce « dans les meilleurs délais ».
La disposition la plus contestée
Parallèlement, dès le 20 mars, le Conseil constitutionnel a été saisi d’une proposition de loi, en application de l’article 11 de la Constitution, « visant à affirmer que l’âge légal de départ la retraite ne peut être fixé au-delà de 62 ans », afin d’empêcher la mise en œuvre de la disposition la plus contestée de la réforme. Ce faisant, ses auteurs entendent mettre en œuvre la procédure dite « de référendum d’initiative partagée » (RIP) ouverte par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 et formalisée par les lois organique et ordinaire du 6 décembre 2013.
Quelles en sont les conditions ? Tout d’abord, la question susceptible d’être soumise à référendum doit porter « sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation… » D’évidence, le sujet des retraites entre dans ce cadre. L’initiative doit prendre la forme d’une proposition de loi présentée par un cinquième au moins des membres du Parlement (577 députés et 348 sénateurs, 925 au total), soit 185. Condition remplie puisque celle-ci a été signée par 252 députés et sénateurs, au-delà même des groupes de gauche de l’Assemblée nationale et du Sénat.
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