Immigration et budget : Les Républicains partagés sur la menace de la motion de censure

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Au jeu comptable, la bascule peut se faire d’un côté comme de l’autre. Avec soixante-deux députés à l’Assemblée nationale, Les Républicains (LR) peuvent faire tomber le gouvernement en joignant leurs voix à celles des autres partis d’opposition pour atteindre les 289 nécessaires, ou, au contraire, en alliant leur vote à la majorité relative.

Seulement, la logique mathématique fait fi des dissensions à droite. Mardi 12 septembre, à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), lors des journées parlementaires du parti, le patron des députés LR, Olivier Marleix, a annoncé qu’il entendait réserver la motion de censure à un cas unique : si le projet de loi sur l’immigration s’avère « laxiste » à ses yeux. Son parti rejette catégoriquement une régularisation pour les métiers « en tension » et constate que « la majorité est divisée » sur ce point après la tribune publiée par Libération, signée lundi par l’aile gauche de la macronie et des parlementaires de la Nupes, qui défend une telle mesure.

De son côté, Aurélien Pradié, qui avait voté la motion de censure en mars sur la réforme des retraites, rejetée à neuf voix près, ne veut pas restreindre la motion de censure au cas évoqué par le chef du groupe LR à l’Assemblée. Le député du Lot n’a pas hésité à appeler sa famille politique à envisager « sérieusement » d’autres motions de censure pour défendre ses positions non seulement sur l’immigration, mais aussi sur le budget.

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« On n’engage pas un bras de fer avec des bras en mousse », a expliqué dans Le Parisien le député du Lot, pour qui « LR doit assumer d’être dans l’opposition ». « Une position singulière qui lui appartient », a rétorqué un cadre LR à Saint-Malo cité par l’Agence France-Presse.

Sur la motion de censure, la prudence est de mise pour le chef du parti Eric Ciotti : « Ce ne doit pas être une fin en soi », explique-t-il. « Cette procédure, comme toutes celles de destruction massive, n’a pas vocation à être annoncée à l’avance », a-t-il ajouté. M. Ciotti, qui avait affirmé il y a deux semaines que le but de son parti « n’était pas de faire tomber le gouvernement », a toutefois reconnu être « complètement en phase » avec Olivier Marleix pour en déposer sur « des textes qui sont extrêmement dangereux pour notre pays ».

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LIOT verra « au cas par cas »

« Rien n’est à exclure » en matière de censure du gouvernement, a prévenu mardi soir le président du groupe des députés Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT), Bertrand Pancher, à l’issue d’une discussion « franche » à Matignon avec la première ministre, Elisabeth Borne. « Nous verrons au cas par cas comment ça va se passer. Si nous n’obtenons pas satisfaction, évidemment nous nous réservons toujours la possibilité de déposer une motion de censure », a déclaré M. Pancher.

Il a également « expliqué à la première ministre que le président Macron s’y était pris comme un pied » en recevant fin août à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) les partis politiques : « Cela aurait été mieux de discuter avec les responsables des groupes parlementaires » étant donné que le gouvernement ne dispose pas de majorité à l’Assemblée nationale.

MM. Pancher et Naegelen étaient les premiers responsables politiques à être reçus par la première ministre, qui entame une série de rencontres bilatérales avec les présidents de groupes parlementaires et les chefs de partis sur les « sujets de la rentrée parlementaire », dont le projet de loi controversé sur l’immigration et le projet de budget, sur lequel Mme Borne pourrait recourir à nouveau à l’article 49.3 de la Constitution.

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Sur le budget, un accord entre LR et le gouvernement difficile

Si Olivier Marleix n’a pas brandi la menace d’une motion de censure sur le budget − au contraire d’Aurélien Pradié −, il n’en a pas moins douché les espoirs du gouvernement de trouver un compromis avec LR sur les finances publiques. Il a rejeté la main tendue par le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, pour construire un compromis sur la loi de programmation des finances publiques (LPFP) qui sera soumise au Parlement fin septembre en session extraordinaire.

Avec une majorité relative à l’Assemblée nationale, le gouvernement a besoin du soutien d’une partie de la soixantaine de députés LR pour adopter sans recours au 49.3 ce texte au menu de la session extraordinaire à la fin du mois. Rejetée l’an dernier par le Parlement, cette loi fixe les objectifs annuels de déficit et de dette publique de la France jusqu’en 2027.

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« Que Bruno Le Maire ne vienne pas aujourd’hui compter sur nous pour lui donner un quitus de bonne gestion », a assuré M. Marleix, qui a rappelé que la dette de l’Etat avait dépassé les 3 000 milliards d’euros. Selon le gouvernement, un nouveau couac parlementaire sur la LPFP ferait perdre à la France une dizaine de milliards d’euros de fonds européens en 2023 et huit milliards en 2024.

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Le Monde avec AFP

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