Pour la prérentrée des enseignants, Emmanuel Macron a choisi un lycée professionnel d’Orange, dans le Vaucluse, vendredi 1er juillet. Le choix n’a rien d’anodin, puisque la réforme de ces établissements à vocation professionnelle démarre avec la nouvelle année scolaire, entre gratification pour les élèves stagiaires et rapprochement avec le monde de l’entreprise.
« Quand on ouvre le capot et qu’on regarde vraiment ce qui se passe et ce qui est votre quotidien, la situation, elle est inacceptable, c’est celle au fond de l’assignation à résidence (…) de beaucoup d’injustice et de déterminismes familiaux », a concédé le chef de l’Etat devant les professeurs du lycée de l’Argensol, spécialisé dans la carrosserie et la maintenance automobiles, et accompagné du nouveau ministre de l’éducation, Gabriel Attal, et de la ministre déléguée à l’enseignement professionnel, Carole Grandjean.
Le chef de l’Etat, très impliqué dans les sujets d’éducation, a annoncé ses ambitions : « zéro décrochage », « 100 % d’insertion professionnelle ». Il ambitionne de transformer des établissements souvent synonymes d’échec scolaire et d’inégalités en « filière d’excellence » grâce à une meilleure attractivité des formations et à une revalorisation de la rémunération des enseignants. « Il vaudrait mieux avoir une orientation choisie que subie. Arrêtons de dire que, “puisque tu es nul, tu iras en lycée pro” », a abondé Mohamed Laasri, enseignant en chaudronnerie, en vantant avec passion les mérites de sa filière.
« J’attends qu’une revalorisation ne passe pas par du travail en plus »
C’est au milieu d’un atelier de carrosserie et mécanique automobile que le chef de l’Etat a aussi dû répondre à des enseignants sceptiques, voire critiques vis-à-vis de la réforme. « J’attends qu’une revalorisation [salariale] ne passe pas par du travail en plus, on fait déjà beaucoup », a lancé un enseignant en prévention santé environnement, disant « avoir honte » de manquer déjà de temps pour préparer ses cours. Le pacte très controversé mis en place dès cette rentrée lie en partie les hausses de salaires à des missions d’encadrement des élèves et de remplacement de collègues absents.
« Les feuilles de salaire sont extrêmement insatisfaisantes, malgré les efforts qui ont été faits (…) On paie mal les professeurs en France, et c’est source de frustration », a renchéri Madeleine Bernard, professeure d’enseignement général.
A un kilomètre de là, à la gare d’Orange, une centaine de manifestants s’étaient rassemblés, à l’appel de la CGT Vaucluse, pour réitérer leur opposition à la réforme des retraites, au jour de son entrée en vigueur, et demander des mesures en faveur du pouvoir d’achat. « Je veux montrer au président qu’on maintient la pression » sur les retraites, a lancé François Sandoz, 41 ans, directeur de la Ressourcerie du Pays d’Arles.
« Venir aujourd’hui dans une ville d’extrême droite est un symbole fort. On voit bien qu’il y a de plus en plus une alliance tacite entre le RN, les LR et les macronistes », estime-t-il encore, en citant la récente décision du ministre de l’éducation d’interdire les abayas.
Un tiers des lycéens sont scolarisés dans des établissements professionnels
Le président devait également s’adresser à l’ensemble des chefs d’établissements de lycées professionnels lors d’un webinaire en début d’après-midi. Un tiers des lycéens français, soit environ 621 000 élèves, sont scolarisés dans ces établissements. Celui de l’Argensol, situé dans le cinquième département le plus pauvre de France et en terre historique de l’extrême droite, avait été choisi parce qu’il est représentatif de la filière et qu’il s’est déjà emparé de certains outils de la réforme.
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Celle-ci prévoit notamment une refonte de la carte des formations, en fonction des débouchés professionnels dans les bassins d’emplois. Aussi, les élèves des lycées professionnels vont désormais recevoir une gratification, de 50 à 100 euros hebdomadaires, lors de leurs stages en entreprise et ils seront mieux accompagnés, y compris dans leur orientation dès la 5e. Le lycée de l’Argensol veut ainsi faire évoluer son offre pédagogique vers la filière nucléaire, en plein essor, afin de répondre aux besoins de la centrale voisine du Tricastin.
Au total, l’Etat va consacrer un milliard d’euros de plus, dès la rentrée, à la filière professionnelle. Un bureau des entreprises a aussi d’ores et déjà été instauré dans tous les lycées professionnels afin d’accompagner les élèves dans leurs recherches de stage et de faire le lien avec les employeurs.