Emmanuel Macron, les sociologues et les « classes moyennes »… Récit d’un déjeuner confidentiel à l’Elysée

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Emmanuel Macron se cherche des capteurs. Deux semaines après avoir renoué avec des économistes qui l’avaient soutenu dans sa conquête du pouvoir, le chef de l’Etat a accueilli mardi 23 mai, selon les informations du Monde, un « déjeuner des sociologues », à l’Elysée. Ce jour-là, quatre chercheurs prennent place dans le salon des ambassadeurs, où se tient d’ordinaire le conseil des ministres : Jean Viard, directeur de recherches CNRS au Cevipof, sociologue proche d’Emmanuel Macron ; Philippe Moati, professeur d’économie et cofondateur de l’Observatoire société et consommation, qui a travaillé sur les « gilets jaunes » ; Jérôme Fourquet, directeur du département opinion à l’IFOP, et le journaliste Jean-Laurent Cassely, coauteurs de La France sous nos yeux : économie, paysages, nouveaux modes de vie (Seuil, 2021). Un échange confidentiel, avait exigé l’Elysée des participants, sommés de laisser leurs téléphones à l’entrée. « Cela n’avait pas vocation à faire l’objet d’une photo dans Paris Match… ni d’un article dans Le Monde », s’étonne M. Cassely.

Devant chaque assiette, un carton détaille le menu : « Société, consommation, modes de vie ». « Parlez-moi des transformations de la société », ouvre le chef de l’Etat qui s’évertue à reconquérir l’opinion publique, après avoir réformé les retraites en braquant le pays. Mieux vaut tard que jamais, songent ces invités soucieux de dépeindre « la France d’Amazon et des ronds points », selon l’un d’eux. « Les gens veulent reprendre le pouvoir sur le temps, amorce Jean Viard. Ce n’est pas la quantité de travail qui pose problème, mais l’absence de liberté de choix. » Emmanuel Macron et Alexis Kohler prennent note. Si les Français renâclent à travailler plus longtemps, ce serait à cause du sens de l’effort émoussé ou d’une perte de civisme, martèle-t-on en Macronie.

« Le temps a appartenu à Dieu, puis il a appartenu au travail. Aujourd’hui, il appartient à l’individu », positive Jean Viard, qui ajoute qu’au pays des congés payés et des 35 heures, le pouvoir politique doit « partir de cette culture plutôt que de la contourner et de vouloir calquer la culture industrielle allemande ». « Les Français aspirent à reprendre le contrôle sur leur vie », abonde Jérôme Fourquet, en référence aux slogans dans les manifestations contre le départ à la retraite à 64 ans : « Il nous vole deux ans de vie. » Alors que le télétravail aggrave les fractures sociales et territoriales, l’auteur de L’Archipel français suggère à Emmanuel Macron d’inventer une compensation pour les salariés prisonniers d’horaires rigides. Guère convaincu, le président de la République objecte que des voisins du Touquet, partis vivre dans leur résidence de villégiature durant la pandémie, reviennent s’installer à Paris.

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