« Partenariat », « innovation », « pari risqué » : le parti macroniste aime toujours puiser dans le champ lexical de la culture entrepreneuriale. En visite à La Réunion, Stéphane Séjourné, secrétaire général de Renaissance, a signé, vendredi 24 février, ce qui ressemble à un accord de sous-traitance politique. Incapable de s’implanter dans l’île, la formation présidentielle a décidé de « renoncer à une structuration locale » et a choisi de confier au Mouvement politique trait d’union (MPTU) « le soin d’organiser l’animation politique du territoire en son nom ». Toujours selon les termes de cet accord, MPTU « s’engage à relayer l’action du gouvernement et d’Emmanuel Macron chaque fois que nécessaire et principalement lorsque mensonges et désinformations prospèrent ».
Jeune parti politique formé à la fin de 2022, Trait d’union est dirigé par Michel Vergoz, 73 ans, une figure politique locale, maire de la commune de Sainte-Rose, conseiller régional d’opposition et macroniste avant le premier tour de l’élection présidentielle de 2017. Le temps est révolu où En marche ! cherchait avant tout à faire appel à des personnalités de la société civile et non à des professionnels de la politique.
Animé par des personnalités inconnues des citoyens et sans expérience politique, en proie à des luttes d’influence et des querelles de chapelle, le parti présidentiel, qui compte moins de quatre-vingt membres sur l’île, n’a jamais réussi à peser localement. En témoignent les échecs successifs de la formation macroniste dans les urnes, que ce soit lors des européennes de 2019, de la présidentielle ou des législatives de 2022.
Impopularité de Macron
A La Réunion, comme dans beaucoup de territoires d’outre-mer, la présidentielle a fait resurgir un vote de défiance à l’encontre du chef de l’Etat. Au premier tour, Jean-Luc Mélenchon y est arrivé largement en tête avec 40,26 % des voix, suivi de Marine Le Pen (24,73 %). Au second tour, la candidate d’extrême droite a réalisé un score historique dans l’île (59,56 %), largement supérieur à celui qu’elle a obtenu au niveau national (41,45 %). Aux législatives, aucun des candidats soutenus par Renaissance n’est arrivé au second tour. Au total, La Réunion compte cinq députés de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), un socialiste et un divers droite. « Nous nous sommes pris un 7-0, peste Michel Vergoz. Les électeurs nous ont fait un bras d’honneur. »
En signant ce partenariat, Stéphane Séjourné entend « faire confiance aux élus locaux », qui agissent sans dépendre « des directives de Paris et des éléments de langage tout faits ». Avec M. Vergoz en première ligne. « Social-démocrate et républicain » qui s’est construit dans l’adversité avec le Parti communiste réunionnais de Paul Vergès, hégémonique à gauche jusque dans les années 2000, cet élu madré est l’un des rares hommes politiques réunionnais à mouiller sa chemise pour défendre la réforme des retraites. Débatteur aguerri, connu pour sa faconde intarissable, revendiquant son étiquette d’« iconoclaste », l’ancien sénateur de 2011 à 2017 – qui a également été pharmacien et animateur radio – appelle les autres élus réunionnais soutenant le gouvernement à « travailler à découvert ». Un message indirect vers Cyrille Melchior (divers droite), président du conseil départemental, de la sénatrice UDI Nassimah Dindar ou de Michel Fontaine, responsable du parti Les Républicains à La Réunion, tous soutiens d’Emmanuel Macron mais qui restent discrets ou très mesurés pour appuyer la politique gouvernementale. Quant au sénateur Renaissance Michel Dennemont, ses proches reconnaissent qu’il n’a pas les qualités d’un « tribun ».
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