vendredi, mai 3
Forces antiaériennes ukrainiennes, dans la région de Donetsk (Ukraine), le 20 février 2024.

La guerre russo-ukrainienne, qui s’éternise depuis deux ans, a profondément modifié le commerce des armes, renforçant le poids des Etats-Unis et marginalisant la Russie, qui concentre sa production sur ses propres armées. Dans son dernier rapport annuel sur les exportations d’armes dans le monde, publié lundi 11 mars, le Stockholm International Peace Research Institute (Sipri) révèle ainsi que les importations d’armes en Europe ont presque doublé (+ 94 %) au cours des cinq dernières années (2019-2023) par rapport aux cinq années précédentes, alors que les ventes russes à l’étranger ont été réduites de moitié.

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Le Sipri étudie ce marché sur des périodes de cinq ans pour lisser les fluctuations parfois importantes d’une année sur l’autre, et bien identifier les tendances. Sur 2019-2023, le classement mondial des « marchands de canons » évolue. Depuis février 2022, une trentaine de pays – Etats-Unis en tête – ont fourni des armes à Kiev, devenu le quatrième importateur mondial.

De leur côté, de nombreux Etats européens ont acquis avions, hélicoptères, véhicules de combats et systèmes de défense antiaérienne dans le cadre d’une politique de réarmement également destinée à respecter leur engagement vis-à-vis de l’OTAN de consacrer au moins 2 % de leur richesse nationale à la défense.

« Impératif stratégique »

Directeur du Sipri, Dan Smith rappelle que l’Europe, loin d’être marginalisée, est « responsable d’environ un tiers des exportations mondiales, ce qui reflète [sa] forte capacité militaro-industrielle ». Les faits n’en restent pas moins cruels et les chiffres têtus. L’Union européenne soulignait le 5 mars, par la voix de son Haut représentant pour les affaires étrangères Josep Borrell, qu’« une industrie européenne de la défense forte, résiliente et compétitive est un impératif stratégique ». On en est loin.

Au cours des cinq dernières années, 55 % des importations en Europe provenaient des Etats-Unis, contre 35 % sur la période 2014-2018. Ils pèsent désormais 42 % des ventes mondiales de matériels de défense, exportant plus d’armes vers plus de pays. Ce dynamisme conforte un complexe militaro-industriel comptant les premières entreprises mondiales du secteur, comme Lockeed-Martin, Raytheon Technologies, Boeing, Northrop Grumman ou General Dynamics.

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Le choix en faveur des Américains n’a rien d’étonnant. Après l’invasion russe de l’Ukraine, il y avait urgence à se réarmer et malgré de fortes tensions sur son outil industriel, les Etats-Unis avaient une capacité de mobilisation plus grande que les Européens et une politique de soutien à l’Ukraine encore plus affirmée. En outre, la majorité des pays du Vieux Continent s’est placée sous le parapluie de l’OTAN depuis 1949, et donc de Washington, même quand ils disposaient d’une solide industrie de défense, comme le Royaume-Uni, l’Allemagne ou l’Italie, et aujourd’hui la Suède. Berlin pouvait difficilement acheter un autre appareil que le F-35 pour emporter la force de dissuasion américaine basée sur le sol allemand.

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