Voilà un rapport solidement étayé, qui tombe à point nommé. Deux semaines après le lancement, lors du sommet du G20 de New Delhi, d’un large appel d’économistes et de politiques à taxer les ultrariches au nom de la justice fiscale – cosigné par 139 millionnaires américains et britanniques prêts à contribuer sans délai –, le groupe des Verts-Alliance libre européenne au Parlement européen rend public, mercredi 20 septembre, une étude exhortant à passer « du slogan à la réalité ».
« L’Espagne a pris les devants en Europe, en lançant un impôt sur la fortune temporaire et progressif. Pourquoi les autres membres de l’Union européenne ne suivraient-ils pas ? », interrogent en préambule les Verts, en référence à la « taxe de solidarité » instaurée par le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez, début 2023, pour une durée de deux ans.
Cette étude, réalisée par l’ONG Tax Justice Network à partir de données sur les revenus, le patrimoine et les inégalités, de statistiques de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de travaux d’économistes, tels Gabriel Zucman et Emmanuel Saez, évalue « le potentiel lié à la mise en place d’un impôt sur la fortune », ainsi qu’à « l’éradication des abus fiscaux des superriches ». Elle livre ces chiffres chocs : un impôt sur la fortune (ISF) « modéré et progressif, centré sur les 0,5 % les plus riches » de chaque Etat européen rapporterait chaque année plus de 213 milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires dans les caisses publiques. A lui seul, ce « top 0,5 % » détient près de 20 % de la richesse européenne, contre 3,5 % pour la moitié de la population la moins riche, rappellent les Verts. Leur patrimoine s’est accru de 35 % en dix ans.
1,35 % du PIB cumulé des Vingt-Sept
L’Allemagne et la France, notamment, auraient beaucoup à gagner de la mise en place d’un tel impôt sur les plus fortunés, soit respectivement 65,1 milliards d’euros et 46,1 milliards, mais aussi dans leur sillage, toute l’Europe du Sud, l’Italie (avec 27,2 milliards d’euros), le Portugal (3,7 milliards) ou la Grèce (1,4 milliard). A la différence de la taxe votée en Espagne ou de l’impôt sur la fortune immobilière français (IFI), l’impôt proposé par les Verts porterait sur l’ensemble des actifs (immobiliers, dépôts bancaires, parts d’entreprises, œuvres d’art, etc.).
Inédit à l’échelle européenne, ce chiffrage a de quoi interpeller. Ces rentrées fiscales représenteraient 1,35 % du produit intérieur brut (PIB) cumulé des Vingt-Sept, sans même tenir compte des progrès possibles du côté de la lutte contre l’optimisation fiscale des grandes fortunes dans les paradis fiscaux, que les Verts appellent à renforcer. Une somme équivalente à un chèque de 1 083 euros par ménage européen, qui constituerait la promesse d’une redistribution significative de la richesse nationale des Etats.
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