C’est l’inclination de Louis XIV dès son plus jeune âge pour la danse qui a permis la création du régime de retraite spécifique de l’Opéra de Paris. Le souverain, qui s’était produit en public pour la première fois à 12 ans dans le Ballet de Cassandre en 1651, s’est préoccupé pendant tout son règne des arts chorégraphiques et de la musique. En 1698, en signant un nouvel édit, le roi de France a donc créé le deuxième système de retraite de l’histoire, après celui des marins, pour la profession des danseurs de l’Opéra de Paris. L’âge de départ avait alors été fixé à 40 ans, un seuil qui n’avait pas bougé jusqu’à ce qu’il soit reporté à 42 ans en 2010, quand Nicolas Sarkozy avait engagé sa réforme des retraites.
Fin décembre 2022, ce régime comptait 1 951 cotisants pour 1 919 retraités. Il était très légèrement bénéficiaire cette même année uniquement grâce à une importante subvention de l’Etat de 19 millions d’euros. Sans cette manne, ce régime resterait structurellement déficitaire chaque année.
Dans la réforme du régime des retraites débattue au Sénat, il n’est en rien question d’y mettre fin, contrairement à ce qui avait été envisagé en 2019. La dernière tentative avortée a, semble-t-il, servi de leçon. Le corps de ballet et l’Orchestre symphonique de l’Opéra s’étaient opposés très violemment à ce projet. La grève dure qu’ils avaient menée avait alors conduit à l’annulation de soixante-trois spectacles et avait grevé les comptes de 12,3 millions d’euros en pertes de billetterie.
« Pénibilité » du métier
Aujourd’hui, les danseurs de l’Opéra de Paris peuvent tirer leur révérence à 40 ans (ouverture des droits à la retraite) ou à 42 ans (pour une retraite à taux plein sans décote), en raison de la « pénibilité » du métier, des risques de blessure et du niveau d’excellence requis pour danser les grands ballets. Pour les artistes du chœur, l’ouverture des droits est fixée à 57 ans et la retraite à taux plein sans décote à 60 ans. Il faut attendre, selon ces mêmes critères, 60 ans ou 62 ans pour les musiciens de l’orchestre.
Là encore, la direction souligne les risques de fatigue inhérente aux dizaines d’années de pratique de ces artistes. Ils peuvent être sujets, avec le temps, à des « troubles musculo-squelettiques » ou à des risques pour l’audition.
Les techniciens, « soumis à une fatigue exceptionnelle » – ils portent des charges lourdes, travaillent sur le plateau, à des horaires à la fois variables et atypiques –, peuvent partir en retraite à 57 ans (ouverture des droits) ou à 62 ans (retraite à taux plein). Les autres techniciens et administratifs voient leurs droits ouverts à la retraite à 62 ans et peuvent toucher une retraite à taux plein sans décote à 67 ans.
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