Louis Gallois et Pierre Papon : « Sans un effort accru de recherche, la France est menacée de “descendre en deuxième division” »

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La recherche française ne va pas bien. Tous les indicateurs sont à l’orange. La performance de la France en termes de recherche et d’innovation est en recul depuis plusieurs années. Elle nous place au dixième rang mondial (en baisse de trois places par rapport aux années 2000) derrière l’Australie et le Canada en matière de publications scientifiques dont l’indice d’impact recule également, loin des Big Five Science Nations (Chine, Etats-Unis, Allemagne, Royaume-Uni et Japon).

Concernant l’innovation, la France est encore plus loin ; elle occupe en 2022 la douzième place (en recul par rapport à 2021) du Global Innovation Index, derrière des pays comme la Finlande, la Suisse ou le Danemark. Nous nous situons au neuvième rang pour les dépôts de brevets aux Etats-Unis. Du côté des chercheurs, le constat n’est pas meilleur : le nombre de recrutements des enseignants-chercheurs est passé de 3 600 en 2011 à 2 200 en 2022, alors que les départs à la retraite s’accélèrent. Les sciences « dures » et la technologie sont les plus touchées. Même évolution pour les doctorants : − 4 % de 2021 à 2022 et − 10 % pour les mathématiques, pourtant un domaine d’excellence en France.

Le rapport remis en juin par Philippe Gillet, ancien vice-président de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne et ancien directeur de l’Ecole normale supérieure de Lyon, à Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, énonce ses propositions sur un constat sans concessions : absence de stratégie fondée sur une vision consolidée, défaut de planification et de coordination, complexité de l’organisation de la recherche publique, bureaucratisation croissante, déséquilibre entre les financements liés à des appels à projet et financements de base des laboratoires insuffisants, alors que ce sont eux qui permettent la prise de risque. Le rapport appelle à renforcer l’attractivité de la recherche pour les jeunes chercheurs aussi bien sur les rémunérations que sur l’amélioration des conditions de travail. Des réformes s’imposent. La ministre a prévu de s’exprimer sur les recommandations du rapport Gillet. Il y a urgence à agir, même si cela doit heurter des conservatismes bien ancrés.

Prise de conscience collective

Le rapport Gillet et les comparaisons internationales montrent clairement que l’insuffisance globale et récurrente de l’effort de recherche français est le point central de notre retard. Depuis le début des années 2000, la part du PIB consacrée à la recherche plafonne autour de 2,2 %. Les deux tiers sont portés par les entreprises, dont la performance se situe à un bon niveau international, si on la rapporte à la taille de notre industrie. Mais nous sommes loin de l’objectif européen de 3 % – pourtant adopté par la France –, et nous devons nous comparer à la Corée du Sud (4,8 %), aux Etats-Unis (3,5 %), au Japon (3,3 %) et à l’Allemagne (3,1 %) qui s’est fixé l’objectif de 3,5 %. De tels écarts dans la course à la connaissance et à l’innovation sont rédhibitoires.

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