Annoncé pour le second semestre 2023, le ralentissement de l’inflation pourrait se faire attendre un peu plus longtemps que prévu. Dans une note de conjoncture publiée vendredi 5 mai, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) affiche sa prudence : si l’inflation sur douze mois, qui s’est établie à 5,9 % en avril après 5,7 % en mars, « [pourrait] refluer en mai et juin » et atteindre 5,4 % au mitan de l’année, « cela ne présume pas de la suite », avertit Julien Pouget, chef du département de la conjoncture à l’Insee.
Explication : après la hausse de l’énergie et celle de l’alimentation, ce sont les services qui risquent de prendre le relais en tirant les prix vers le haut, de manière certes moins spectaculaire, mais tout aussi pénalisante pour les consommateurs. En effet, rappelle M. Pouget, « [ils] représentent 50 % de la consommation des ménages », soit bien plus que l’alimentation, laquelle ne pèse que 16 % des dépenses totales des Français.
A ce stade, la hausse des coûts des services sur un an reste contenue, de 3,5 % seulement, contre 15,8 % pour l’alimentation, mais « des effets de second tour » – autrement dit de contagion – pourraient se faire sentir dans les mois à venir. Sur les prix alimentaires, l’Insee se montre également précautionneux : malgré la baisse des cours agricoles sur les marchés mondiaux et les perspectives de renégociations entre producteurs et distributeurs, les économistes n’entrevoient « pas de baisse à très court terme ». « Les prix agricoles à la production restent encore au-dessus de leur niveau d’avant la crise », remarque d’ailleurs M. Pouget.
Impact sur le marché immobilier
Dans ces conditions, il ne faut pas espérer voir repartir la consommation des ménages sur la deuxième moitié de 2023. Lorsqu’ils font leurs courses, les Français ont déjà bousculé leurs habitudes : en mars, près de trois quarts d’entre eux (72 %) indiquaient avoir modifié leur façon de consommer, contre 68 % en décembre 2022. La baisse de 9 % enregistrée depuis un an par l’Insee reflète d’ailleurs davantage « un changement de gamme de produits » qu’une baisse du volume des achats.
L’autre moteur de l’activité, l’investissement, ne va pas davantage tourner à plein régime au cours des prochains mois. La hausse des taux d’intérêt destinée à ralentir l’inflation a déjà un lourd impact sur le marché immobilier – donc l’investissement des ménages – ainsi que la construction neuve. Les entreprises, gagnées par une certaine inquiétude sur le niveau de la demande, modéreraient leurs projets d’investissement. En définitive, la croissance au deuxième trimestre se limiterait à 0,2 %, identique à celle enregistrée au premier trimestre.